Ellana Senyl [FINIE !!]



 
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Ellana Senyl [FINIE !!]

Ellana Senyl
Ellana Senyl
Messages : 6
Age : 28
Métier : Reine de Terra
Humeur : Déterminée
Points Histoire : 0
Ven 14 Mar - 21:56
IdentitéNom : Senyl
Prénom : Ellana
Titre : First Lady
Âge : 28 ans - 27 Décembre 734
Genre : Femme
Nature :  Magicienne
Affinité : Terre
Pays : Terra
Métier : Reine de Terra
Langues : Langue Courante et Langue Ancienne
Thème :



Caractère et Morale

Si Ellana semble avoir hérité de l'intelligence et de l'empathie de sa mère, elle possède également – et surtout – le caractère impétueux et colérique de son père. Peut-être est-ce là l'héritage enflammé de son arrière grand-mère, princesse d'Ignis.

Véritable bourreau de travail, elle ne considère pas son titre comme un privilège, mais bel et bien comme un devoir envers son peuple. C'est d'ailleurs ce sentiment qui guide ses choix politiques, aussi restreints soient-ils par le Sénat. La protection et l'amélioration des conditions de vie des Terrans demeurent ses principales préoccupations et les moteurs de sa détermination. Pacifiste dans l'âme, répugnant à l'usage de la force pour méthode de gouvernance ou de persuasion, elle n'en reste pas moins une farouche combattante, peu diplomate dans ses propos comme dans ses actes ; au grand dam des ambassadeurs Terrans. Véritablement incorruptible, animée d'un sens aigu de la Justice et du respect de la Constitution, elle n'hésite pas à dénoncer les arrangements amiables entre sénateurs et seigneurs des contrées Terranes lorsque ceux-ci se détournent de leurs fonctions et vocations premières : le Peuple. Elle n'a d'ailleurs pas hésité à dénoncer la politique de son propre père à plusieurs reprises, trop influençable et conciliant avec le Sénat selon elle ; sources de très nombreuses tensions entre le père et la fille et ayant provoqué quelques scissions parmi le peuple et au sein du Sénat qui subsistent encore aujourd'hui.

Au-delà de son visage de régnante, qu'elle affiche bien plus sévère et intransigeant qu'elle ne l'est en réalité, Ellana reste en réalité une jeune femme en proie à un doute perpétuel en ce qui concerne son accession au trône de Terra, véritablement dérobé à son frère par toute la mécanique des jeux de pouvoirs de la Cour. En effet, si elle a fini par se faire une raison quant à la disparition de son aîné au quotidien, le simple fait de continuer à ressentir sa présence au-travers du lien de pacte qui les unis ne cesse de rappeler à son esprit la présence de son frère enlevé à son existence. Ce perpétuel sentiment naît au-travers du pacte fait d'elle une fervente adepte du culte d'Albio, une appartenance qu'elle affiche ouvertement.

Mais bien que profondément pacifiste, il n'en reste pas moins que la jeune souveraine a suivi durant plusieurs années un entraînement militaire rigoureux au sein de la prestigieuse école d'Albio. Habituée à manier un grand nombre d'armes, le maniement de celles-ci n'est cependant pas le plus grand enseignement dont elle fut instruite entre ces murs. Discipline, rigueur, esprit de fraternité ou encore endurance ; ses années d'instruction militaire lui ont surtout permis de poser un regard neuf sur les conditions de vie de ses pairs, et n'ont fait que renforcer ce sentiment d'appartenance et le sens du sacrifice de son existence vouée à servir un peuple ; des hommes et des femmes qui en font tout autant au quotidien.



Physique

Ellana fait bien plus jeune et immature que son âge. Il faut bien admettre que naître et grandir dans un environnement bien moins hostile que les campagnes Terranes a contribué à la préservation de son capital jeunesse. Cependant, si son visage est exempt de cicatrices et peu marqué par le cours du temps et les tribulations de la vie, ses traits n'en reste pas moins habités par les multiples expériences qu'elle a connues et les responsabilités qu'elle endosse.

Un air grave et fermé donnant l'impression que la jeune femme reste murée derrière ses préoccupations ; mais en dépit de cette distance toute illusoire, le simple fait de croiser ses iris aux reflets d'ambre et de noisette fait comprendre à son interlocuteur à quel point son esprit se révèle alerte et aiguisé. Ses yeux en amande et son regard pénétrant ouvrent la fenêtre sur un mental d'acier, affichant très clairement la détermination inflexible et la volonté inébranlable qui animent la reine des Terrans.

Son nez droit, à l'arête fine et l'extrémité pointue illustre d'ailleurs parfaitement tout le tranchant qui caractérise la jeune altesse. Des lèvres rosées, épaisses et droites ne révélant que rarement un mince sourire complètent parfaitement le portrait de la demoiselle au charme austère. Un visage au front haut, encadré par une chevelure tombant en cascade jusqu'à ses épaules dont les reflets oscillent entre le blond doré et le châtain clair. Un front haut donc, qui porte la couronne royale et domine une silhouette altière empreinte de fierté et de fermeté.

D'une taille relativement grande en comparaison des autres femmes du royaume - plus fourbues par les travaux manuels - Ellana n'en reste pas moins plus petite que la grande majorité de ses homologues masculins (1,67m). De constitution plutôt frêle, la jeune femme mise bien plus sur son allure, la fermeté de ses gestes et de sa démarche pour impressionner ses pairs que sur le développement plutôt restreint de sa musculature. La cadette n'en garde pas moins une certaine féminité et un charme indéniable, bien que juvénile, qui lui fait souvent défaut lorsque vient le temps d'instaurer des rapports de force. Fort heureusement, son caractère vient équilibrer le peu de poids physique qu'elle pèse sur la balance.

Bien qu'elle ait suivi une instruction militaire au sein de la prestigieuse école d'Albio, Ellana n'est pas une combattante. Certes elle sait se défendre et a une grande maîtrise des armes les plus courantes, capable de rivaliser avec des soldats expérimentés et la plupart des officiers subalternes, mais elle est surtout consciente que là n'est pas sa place, ni son rôle. Dès lors, il est extrêmement rare de la voir déambuler dans son armure, qui est d'ailleurs davantage portée pour des cérémonies militaires telles que les adoubements ou les défilés ; mais très rarement pour la protéger au cœur de la bataille. D'un point du vue vestimentaire, Ellana arbore le plus souvent des robes plus ou moins saillantes aux couleurs de son royaume - brun, ocre, blanc et sable - toujours frappées des armoiries Terranes. Détail particulier, elle porte deux rubans de soie lavande et sinople noués autour du bras droit, en mémoire de son frère pour le premier et de ses parents pour le second, à l'endroit où se situe son sceau, ressemblant à une superposition de trois triangles rappelant les perspectives sur les chaînes des Elénides.


Compétences générales

Économiste
Forte de longs enseignements et de leçons apprises sur le terrain, la suzeraine de Terra maîtrise et excelle dans la compréhension des rouages de l'économie Terrane, et a d'ailleurs fait de très nombreuses propositions au Sénat pour asseoir un peu plus la puissance économique du pays de la roche sur le marché continental.

Humaniste
Fidèle au culte d'Albio, et nourrie des principes de sa mère au regard de la condition humaine, Ellana fait preuve d'une très grande tolérance à l'égard des différences propres à chaque individu. Et si elle reste elle-même très pieuse, elle prône avant tout la liberté d'expression et de culte au sein de son royaume, comme des valeurs presque aussi fondamentales que l'honneur, la fidélité et la famille. C'est d'ailleurs cet aspect de son caractère qui la pousse aujourd'hui à mener un farouche combat politique pour l'abolition de l'esclavage en Terra.

Mécène
Il est indéniable que l'art de la guerre est la forme d'art la plus répandue dans le royaume Terran. Ellana aimerait cependant voir le peuple Terran s'ouvrir et se développer à d'autres formes d'expressions artistiques – telles que la peinture, la sculpture ou la musique – et également ouvrir son pays aux sciences tout autant qu'aux religions, les premières étant de très loin minoritaires par rapport aux secondes. Ainsi, la famille royale – enfin la Reine – est devenue en quelques années l'une des plus grandes mécènes du royaume Terran, invitant dans la capitale de nombreux artistes, originaires de Ventus pour la plupart.

Soif de connaissances
La jeune Reine a placé la culture et le savoir comme véritables piliers de sa vie. L'instruction et la recherche de connaissance restent les préoccupations les plus chronophages et symboliques de sa vie privée – relativement réduite par ailleurs – il n'est donc pas rare de la trouver le nez plongé dans un livre, une reliure ou parfois en pleine discussion avec quelques représentants de guildes ou autres artisans. Un de ses rêves inavoués : pouvoir mettre les pieds dans la Grande Bibliothèque d'Aquaria.

Combattante chevronnée
Ellana a suivi l'entraînement militaire au sein de l'école d'Albio, et a de ce fait acquis une grande maîtrise des armes de toutes sortes. Ses préférences personnelles sont tournées vers le maniement de l'épée et de l'arc - elle reste une archère redoutable - mais ses obligations de régnante ne lui permettent pas de s'offrir du temps pour entretenir - et encore moins perfectionner - ses aptitudes au combat. Elle n'en reste pas moins une adversaire redoutable, rivalisant de maîtrise avec la grande majorité des soldats et officiers de l'armée.

Maîtrise de la langue ancienne
La souveraine de Terra fut initiée dès son plus jeune âge à l'apprentissage du langage ancien et de la magie de terre, tant par sa mère que par le Haut-Mage de la Cour, Archibald Virigno. Sa maîtrise du langage ancien est donc presque totale, quelques termes et formulations relevant des racines les plus antérieures de la langue ancienne lui échappant encore. Par ce fait, Ellana maîtrise également la magie de terre à un très haut niveau, même si ses connaissances dans les anciens sorts sont encore limitées par son jeune âge et quelques lacunes d'enseignements ; elle n'en demeure pas moins l'une des plus puissantes magiciennes du Royaume de Terra.

Politicienne accomplie
Si durant son adolescence Ellana se faisait un portrait idéaliste de la politique Terrane, considérant le système Terran comme l'un des plus justes et égalitaire du continent, elle a rapidement déchanté en montant sur le trône et en se retrouvant à la dure, triste et sombre réalité du paysage. Néanmoins, elle s'est révélée très réceptive aux enseignements laissés par sa naïveté et a fini par s'imposer dans les rouages politiques du Sénat. Et si la Constitution Terrane défini très clairement les limites de chacun des piliers de la nation, elles n'en restent pas moins relativement aisées à contourner pour qui veut parvenir à ses fins.


 
Équipement, objets divers :

Alderon "La petite sœur" - Épée Royale
Ellana a reçu cette lame au cours de son couronnement, héritage direct et symbolique de son défunt paternel, en même tant que le Bâton des Élénides représentant le pouvoir royal en Terra. Cette relique - venue des âges obscurs dont les origines demeurent mystérieuses et probablement oubliées à jamais - se caractérise tant par sa solidité que sa légèreté. Des runes indéchiffrables parcourent sa lame dont le fil unique luit d'iridescents reflets verts et bleus une fois hors du fourreau. Ressemblant à l'un de ces sabres forgés en Azaïr, le pommeau, la garde, l'âme et le contre-fil de l'arme comptent de nombreuses encoches qui n'entament en rien sa solidité, mais destinent l'arme à être emboîtée au cœur d'une épée, plus massive, réputée maudite, connue dans la famille royale sous le nom d'Arondight, aujourd'hui confiée au Chevalier Noir. La légende veut que les deux sœurs, une fois réunies, forment une lame unique aux enchantements runiques complétés, offrant à son porteur - la Reine en l’occurrence - un pouvoir totalement inconnu, mais dévastateur. Enfin, seulement si l'on parvient un jour à déchiffrer les runes qui y sont inscrites.

Armure Royale
L'armure de la Reine, une armure de plates tout ce qu'il y a de plus conventionnelle dans sa conception, mais magnifiquement ouvragée et décorée par l'un des meilleurs forgerons de la capitale Terrane. Si l'armure a été enchantée et des runes y furent gravées par la jeune souveraine - l'incantation en langage ancien du sort de l'armure de roche - ; de très nombreux psaumes et citations du Magna Carta parcourent les différentes plates, ainsi que de nombreuses références à Albio et ses enseignements. Dans les faits, il est extrêmement rare de voir Ellana déambuler dans son armure royale, bien plus utilisée par ailleurs à des fins cérémonielles que pour aller combattre sur le terrain. Il lui arrive de la porter lors de ses voyages officiels dans d'autres contrées, en digne représentante de Terra, faisant écho à la réputation militaire du pays.

Arc d'Ellana
Un arc totalement banal, qu'elle a reçu lors de son instruction militaire au sein de l'école d'Albio et qu'elle a souhaité conserver. Il lui arrive de s'en servir dans les jardins royaux, la jeune souveraine pratiquant de le tir à l'arc afin de se détendre et libérer son esprit des multiples affaires et devoirs qui lui agitent les neurones à longueur de journée.

Bâton des Élénides
Sceptre royal, Ellana se l'ait vu remettre lors de son couronnement. Symbole de la royauté, fait d'ambre, d'onyx et de marbre blanc, ce bâton ne quitte que très rarement la Reine, et seulement lors de quelques moments d'intimité. Elle ne s'en séparera qu'au moment de le transmettre à son héritier.


 
Sorts – Rang A+ :  


Armure de roche – Rang D
Un des sorts de défense personnelle les plus répandus parmi les magiciens d'affinité terre, il s'agit simplement d'une épaisse couche de roche qui vient recouvrir le corps de son porteur, et qui se révèle suffisamment résistante pour encaisser les attaques de taille et les sorts de niveau inférieur. Dans le cas d'Ellana, ce sort a été gravé sous forme de runes sur les plates de son armure afin de pouvoir être lancé presque instantanément sans avoir à prononcer la formule incantatoire.

Pétrification - Rang C
Sort de neutralisation par excellence, il ne fonctionne que par contact direct entre Ellana et sa cible. Lorsqu'il est lancé, une couche de roche recouvre le corps - des pieds vers la tête - de la cible. Sort non létal cependant puisque le visage de la cible reste à découvert, il permet avant tout d'immobiliser un ennemi, entravant tant ses mouvements que son mana. Idéal pour capturer et maîtriser un puissant combattant, c'est un sort très répandu - presque obligatoire - chez les gardiens de la prison d'Hystia pour entraver les prisonniers à même les murs. Seul le lanceur du sort peut le conjurer pour libérer le prisonnier de son carcan de roche.

Écueils d'Albio - Rang C+
Sort offensif et défensif, il consiste à faire jaillir du sol des éperons rocheux, acérés comme des fers de lance, pour venir empaler les ennemis. Leur taille - longueur et diamètre - est influencée par la quantité de mana utilisée pour l'invocation, cela pouvant aller d'un caillou de la taille d'un doigt à un éperon rocheux de plusieurs tonnes, capable de démolir un engin de siège. Mais ce sort est surtout utilisé pour briser les charges de cavalerie lourde et protéger au maximum l'infanterie.

Séisme – Rang B
Est-il réellement nécessaire de décrire les effets d'un tel sort ? Une fois lancé, la terre tremble et se déchire sous les pieds des ennemis, les fortifications, les bâtiments ; engloutissant et réduisant des villes à néant, désagrégeant des armées et pouvant même modifier le relief de la région concernée. De plus, lancé sur le plancher océanique ou au fond d'un lac, ce sort peut voir ses effets rendus bien plus dévastateurs en donnant naissance à un raz-de-marée. Ellana, de part sa nature pacifiste, espère bien évidemment n'avoir jamais à recourir à ce sort tant les dommages collatéraux pour les populations civiles sont énormes.

Tempête de sable – Rang B+
Lorsque la reine lance ce sort, d'immenses nuées de sable se soulèvent et se condensent en  concrétions et en fines lames tournant sur elles-même à très grande vitesse, sur une étendue  plus ou moins vaste. Les concrétions de sables ainsi projetées détruisent sans mal les matériaux les plus fragiles, et peuvent même, à un niveau supérieur, déchiqueter les chairs et les tissus, ravager une forêt ou encore assécher un cours d'eau. Plus la quantité de mana insufflée dans le sort est grande, plus la vitesse du sable et le diamètre de la tempête seront élevés.

Désolation d'Asaül - Rang A
En référence à l'immense désert méridional du continent, ce sort de haut-niveau se base sur la capacité du sable à absorber l'humidité, et donc assécher toute chose. Son invocation se manifeste sous la forme d'une lance de sable à la pointe acérée tournant à très haute vitesse sur elle-même, capable de transpercer le cuir, le bois et les chairs avant d'absorber toute l'eau contenue dans la cible qu'elle vient de pénétrer. Ce sort peut aussi être lancé contre le sol, où c'est alors une zone - concentrique au point d'invocation - qui s'assèche lentement. Bien évidemment, la quantité de mana insufflée dans le sort détermine la taille de la lance ou l'étendue de la zone visée. C'est un sort de soutien bien plus qu'un sort offensif, très efficace pour épuiser les réserves d'eau d'une ville assiégée. Le sortilège d'assèchement n'est pas instantané, et dépend de l'hygrométrie du sol ou du corps visé.

Serment Royal – Rang A
La légende sur les origines de ce sort est directement liée à l'esprit de bravoure et le patriotisme exemplaires des soldats Terrans ; contant que le serment prononcé par n'importe quel soldat Terran à son entrée en service lie son âme à jamais au service du royaume de Terra et de la royauté - même dans la mort, lesquelles âmes reviendraient à l'appel de leur souverain sous la forme d'êtres de sable pour protéger leur patrie. Dans les faits, il s'agit d'un sort d'invocation de guerriers de sables armés de lances ou d'épées d'ambre et d'onyx, pouvant aller d'une simple poignée à plusieurs centaines de créatures pour se battre aux côtés des soldats de chair et de sang, ralentir la progression d'ennemis ou encore couvrir une retraite. Il s'agit autant d'un sort de soutien que d'un sort offensif.



Influence et Relations – Rang A :

Edwin Senyl - Père et Troisième Roi de Terra [683-(725)-755]
Leur relation est devenue de plus en plus conflictuelle au fil des années - et des événements frappant le royaume et la famille royale - surtout lors de la volonté d'effacer Karel de la scène politique. Excellent monarque, puissant mage de terre et guerrier redoutable, il a cependant toujours gardé une certaine rancœur - surtout nourrie par ses parents - à l'égard de Ventus pour la défaite que les deux pays eurent connue par le passé. Une rancoeur qu'il a converti en plusieurs réformes concernant l'armée Terrane, visant à encore et toujours améliorer les stratégies, les tactiques et la discipline des soldats pour asseoir un peu plus l'élitisme et la réputation de ses armées. Un sentiment  qui le poussa à n'accorder que peu d'intérêt et de crédit aux sciences appliquées, aux arts et à la technomagie. Plutôt conservateur, il a œuvré à entretenir de bonnes relations avec son voisin Ignisien, surtout auprès des proches de sa grand-mère. Il n'en restait pas moins un monarque très proche et très à l'écoute des revendications des Terrans, et a contribué à la mise en place de quelques réformes économiques et sociales - en collaboration avec le Sénat - ayant permis d'accroître la puissance économique de la nation, ainsi que le niveau de vie de ses sujets.
Mais vis-à-vis d'Ellana, leur relation se dégrada au fur et à mesure que la princesse gagnait en maturité et en caractère. Leurs points de vue s'opposaient souvent, avec une Ellana pro-Ventusienne - beaucoup trop selon son père - et surtout beaucoup moins tolérante à l'égard d'Ignis, sa politique et son absolutisme. Cette dissension entre père et fille créa d'ailleurs une véritable scission au sein du Sénat et parmi la population - notamment la noblesse - entre les conservateurs et les réformistes  ; même si avec le temps, la jeune souveraine parvint à rallier à sa cause de plus en plus de personnalités influentes de Terra.

Eliwan Senyl - Mère et Troisième Reine de Terra [702-(725)-748]
Elle fut la fille du Premier Sénateur de l'époque où son grand-père régnait encore. Mariage d'influence avant tout, il n'en demeura pas moins que l'amour entre Eliwan et Edwin était sincère. Puissante magicienne d'eau, ses compétences en matière de soins conjuguées à un caractère empathique, bienveillant et un véritable amour du peuple Terran ont fait d'elle l'une des personnalités les plus appréciées de toute la noblesse Terrane, ainsi qu'un exemple à suivre pour les familles. Si rares furent ses accès de colère, ceux-ci n'en restaient pas moins mémorables et personne n'osait véritablement lui tenir tête dans ces moments-là. Mère aimante, ce fut elle qui se chargea d'enseigner le langage ancien à ses enfants et s'occupa d'une grande partie de l'instruction magique de sa fille, aux côtés du Haut-Mage Virigno. Emportée par la Grande Grippe de l'hiver 748, la mémoire d'Eliwan et les enseignements humanistes qu'elle a inculqués à sa fille continuent d'animer les décisions de la jeune souveraine.

Karel Senyl - Frère aîné [727]
Il aurait dû hériter de la couronne Terrane s'il avait été magicien et si leur Père n'avait pas œuvré pour le faire "mourir" aux yeux du peuple. Bien évidemment, Ellana sait tout du réel parcours de son aîné après son décès orchestré. Car Ellana et Karel étant liés par un pacte, la souveraine savait parfaitement que Karel n'était pas mort, malgré l'insistance de son père à essayer de le lui faire croire les premiers jours. Si Ellana, encore très jeune à l'époque a mis énormément de temps à se faire à l'idée qu'elle ne pourrait plus revoir son frère, l'amour qu'elle éprouve pour lui, s'il a mûri, n'a jamais faibli ; bien au contraire, ce qui n'a fait que renforcer encore la puissance du pacte les unissant.

Philias Hornst - Baron d'Auriantia et Cinquième Grand Général de Terra
Puissance: Rang A
Influence: Rang C+

Cet homme est un véritable génie de guerre, et sa plus grande frustration reste bien évidemment de n'en avoir jamais connu. Belliciste dans l'âme, il était très proche d'Edwin et partageait la table du Roi le plus souvent possible. Sa dévotion à l'égard de Terra et de la famille royale n'a d'égale que son habileté au combat et sa maîtrise de la magie du vent. Véritable "vieux de la vieille", il a choisi de prendre sa retraite quelques années après l'accession d'Ellana au trône, ne partageant pas les désirs et la vision réformiste de la jeune souveraine pour l'armée ; malgré qu'ils restent en très bons termes. Après tout, le vieil homme et Ellana se fréquentent depuis toujours et leurs divergences d'opinions n'entament en rien la vision qu'ils ont de leurs fonctions respectives : servir la nation Terrane. Seules les méthodes diffèrent. Aujourd'hui officiellement retraité et retiré en ses terres d'Auriantia, le Baron Hornst n'en reste pas moins l'un des conseillers de la jeune souveraine, et de part son statut, un appui politique non négligeable pour la Reine auprès du Sénat.

Brunhild Mayfair - Sixième Grand Général de Terra
La succession au poste de Grand Général fut l'une des décisions politiques les plus difficiles à prendre pour la jeune souveraine ; d'autant plus que la lignée des Mayfair ne suscitait pas franchement l'enthousiasme et l'unanimité au sein du Sénat, ni même parmi les Généraux les plus anciens - les prétendants au poste donc - de l'Armée. Une décision cependant incontestable puisque la Reine, en tant que Chef Suprême de l'Armée et symbolisant le pouvoir exécutif de la nation, l'imposa à tous, et rappelant à tous la fermeté de ses convictions et sa détermination à ne pas se montrer conciliante avec les Sénateurs et leurs exigences. Un choix qu'Ellana ne regrette absolument pas, Brunhild se révélant - et de très loin - la plus apte à remplir cette fonction tant par son caractère et ses compétences que par ses connaissances et la vision neuve qu'elle apportait à l'Armée. Ellana a d'ailleurs pris le temps d'étudier son traité de stratégie autant que son parcours - comme ceux des autres candidats plus "choyés" par le Sénat - avant de prendre sa décision, mûrement réfléchie.

Warnoch Artwhÿs - Chef de la Garde Royale
Ellana le côtoie depuis qu'elle a treize ans, bien que son père ait insisté pour que cette rencontre ait finalement lieu. Warnoch et la princesse ont fini par faire plus ample connaissance, au fil des voyages et des années. L'homme a toujours su être présent dans les épisodes les plus marquants de la vie de la jeune princesse : l'enterrement de la Reine, celui du Roi, puis son propre couronnement, pour ne citer que ces moments-là. Ellana a choisi de le mettre à l'épreuve - dans le plus grand secret avec son prédécesseur - alors qu'il était d'ores et déjà Garde Royal, afin de voir si Warnoch ferait honneur à la réputation de sa famille - un fait dont la jeune Reine n'a jamais douté. Après avoir réussi l'épreuve très haut la main, prouvant ses aptitudes à diriger la Garde Royale, il fut nommé Chef de la Garde. La souveraine a une confiance aveugle en cet homme, en ses valeurs et son jugement. Ellana tient Warnoch en très haute estime, comme chacun des hommes de la Garde Royale et aimerait s'en faire un ami un peu plus proche, au-delà de leurs fonctions respectives qui s'avèrent être une véritable barrière, quand bien même Ellana comprend la nécessité d'avoir le Chef de la Garde toujours à ses côtés.

Arundel - Confidente et Suivante
Puissance: Rang E
Influence: Rang C

Nourrice, puis gouvernante, préceptrice et enfin suivante et confidente d'Ellana, Arundel a toujours partagé le quotidien de la princesse de Terra, lui donnant le sein durant les premiers mois de sa vie jusqu'à être l'épaule et l'oreille attentive de la jeune suzeraine dans les moments les plus difficiles. Ellana partage tout avec Arundel, ses joies, ses peines, ses doutes ; confiant tous ses secrets - enfin presque - avec celle qui lui enseigna l'étiquette, les codes de la noblesse, les bonnes manières, ainsi qu'à lire, écrire et compter ; bref, tout ce qui sied à une princesse digne de ce nom. Véritablement considérée comme une seconde mère par la jeune femme, elle est tant sa force que sa faiblesse ; l'affection qu'Ellana porte à sa confidente n'a d'égal que l'amour qu'elle porte à son aîné, et la jeune Reine pourrait déchaîner les flammes de l'enfer - métaphoriquement parlant - contre celui qui aurait l'idée stupide de s'en prendre à sa suivante.

Sénateur Siggert Pardow - Seigneur d'Erithria
Puissance: Rang D
Influence: Rang B

Dans ses jeunes années empreintes de naïveté, Ellana pensait que Couronne, Sénat, Armée et Justice servaient le peuple et le pays avec dévotion et abnégation. Que dure fut la chute et ardue la remontée de la pente. Si la Constitution sépare bel et bien les pouvoirs entre exécutif et législatif - dans l'idéal - dans les faits; c'est bien plus complexe que cela. Ellana a rapidement compris que la politique Terrane était affreusement influençable et corruptible, et que lutter contre la nature humaine de ce constat se révélait être un combat perdu d'avance. En grande Albioniste, Ellana se lança donc dans cette croisade contre la corruption et le trafic d'influence, et chercha à rallier à sa cause certaines Sénateurs et hommes d'influence respectables pour mener ce combat à ses côtés. Le Sénateur Pardow fait partie de ces hommes et reste le soutien le plus indéfectible de la volonté de la Reine au sein du Sénat - et l'un des plus vindicatifs par la même occasion. Homme de sagesse, très terre-à-terre, ses conseils sont toujours avisés; guidés par la prudence et l'expérience de la politique de haut-niveau. Lorsque Ellana a une proposition de loi à soumettre au Sénat, elle passe par l'intermédiaire du Sénateur Pardow, et suit généralement ses conseils.

Haut-Mage de Terre Archibald Virigno
Puissance: Rang A+
Influence: Rang C+

Archibald Virigno est très probablement le magicien de terre le plus puissant de la nation, sinon du continent. Né à Ventus, devenu prêtre puis évêque à Aquaria, il a fini par quitter les ordres Eholiens pour se mettre au service du Roi de Terra - un fait qu'il n'a jamais voulu expliquer. Maîtrisant le langage ancien à la perfection, il a voué son existence à étudier le mana, la magie et les règles qui régissent les flux d'énergie sous toutes les coutures. Considéré comme un génie dans le domaine, il refuse cependant d'utiliser sa magie et ses sortilèges à des fins de mort ou de destruction. Véritablement excentrique, peu de gens comprennent ses agissements, totalement imprévisibles, alors qu'il semble passer le plus clair de ses journées l'esprit enfermé dans son propre monde, il est l'auteur de nombreuses facéties bien malgré lui, provoquées par ses étourderies continuelles.
Ellana a une très haute estime du Haut-Mage, qu'elle côtoie depuis sa plus tendre enfance ; et il s'agit d'un ami bien avant d'être son précepteur. S'il lui a enseigné la plus grande majorité des sorts qu'Ellana connaisse ; il a toujours refusé de lui enseigner les anciens sorts qu'il maîtriserait - à l'exception de la Désolation d'Asaül pour prouver à la Cour sa maîtrise des anciens sorts et faire taire les accusations de charlatanisme qui pesaient sur lui. D'après ses propres dires, il aurait tant étudié cette magie et la langue ancienne qu'il serait capable de manipuler la gravité terrestre, chose qu'il n'a cependant jamais prouvé par les faits ; mais Ellana le croit sur parole.


Autre
Comment avez-vous connu le forum ?
Oulà j'ai oublié depuis... Sawen très certainement.

Des choses à améliorer ?
Rien à redire sur le forum. Ça viendra peut-être en cours de jeu.

Crédits :
Spoiler:

Un dernier mot ?
On ne désespère pas d'y arriver...

Ellana Senyl
Ellana Senyl
Messages : 6
Age : 28
Métier : Reine de Terra
Humeur : Déterminée
Points Histoire : 0
Sam 24 Mai - 17:13
Histoire

Introduction

Je m'appelle Ellana Senyl, souveraine du Royaume du Terra. Vous connaissez forcément mon histoire, ma vie, ses tragédies et ses joies ; peut-être même avez-vous connaissance de mes actions et mes exactions, des coups de sang aux coups de gueule, mes larmes, mes cris, de tout ce que nos livres et nos mémoires se souviennent et racontent. Ou du moins le pensez-vous...

Je suis née le 27 Décembre 734, un jour froid et brumeux prémisse à un hiver rigoureux qui frappa le royaume, m'a-t-on raconté. A vrai dire, je n'ai – comme tout le monde – aucun souvenir de mes premières années d'existence en Albion, sinon quelques bribes de souvenirs et sentiments flous, impossible à situer dans le temps. De mes toutes jeunes années, je n'en garde qu'une phobie m'ayant oppressé des années durant : celle des chiens. Les cabots me collaient une trouille bleue ; la constellation de cicatrices étoilées qui parcourt mon avant-bras gauche en sont la cause, en plus d'un douloureux souvenir. Une des premières leçons que j'ai apprise : qu'importe la prudence, la patience ou la force, un chien acculé finira toujours par vous mordre.

Une leçon qui a fini par me caractériser au sein de la Cour Royale, faisant de moi une jeune princesse aussi exaspérante que redoutée : pousser les gens jusqu'à leurs dernières limites et me pousser moi-même jusqu'aux termes de mes propres limites. Aujourd'hui, les chiens ne me font plus reculer ; plus rien d'ailleurs. Mais il n'en a pas toujours été ainsi... La majorité des gens pensent que naître avec le sang bleu est un privilège, ouvrant les portes d'un monde de faste et de facilités... Certes je n'ai jamais eu l'estomac tordu par la faim, ni passé une nuit sans pouvoir fermer l’œil, grelottante dans des couvertures froides et humides sous une pluie battante ; mais la vie menée à une gamine appelée à hériter de la couronne du royaume Terran effraierait en réalité nombre de mes détracteurs.

Très tôt, il est apparu que j'étais une magicienne, à l'inverse de mon frère aîné totalement dépourvu de cette capacité d'interagir avec le mana. Un jour - je devais avoir cinq ou six ans - mon père m'a confié que je serais Reine de Terra.



A Royal Fate9 Juin 740 - Début de soirée
Palais Royal - Hystia


"Tu seras Reine ma fille," m'annonça mon père, assis à mes côtés alors qu'il venait finir de me border. Ces moments d'intimités relevaient de l'exceptionnellement rare entre lui et moi. Débordé par ses responsabilités quotidiennes de régnant, je connaissais bien mieux le visage et le caractère d'Arundel, ma gouvernante, et ceux de la plupart de mes précepteurs que les traits de mon propre père. Mais ce soir-là, il était lui-même venu me souhaiter une bonne nuit, après avoir pris le temps de me conter - à sa manière - la légende d'Albio, père spirituel de la très grande majorité des Terrans. J'adorais ces histoires issues d'un passé qui ne m'atteignait que difficilement, et pourtant, elles prenaient un tout autre sens sorties de la bouche de mon paternel. Tout semblait se couvrir d'un voile solennel, où la magie et le rêve laissaient place à une réalité bien plus dure ; une réalité que je finirais par devoir affronter.

"Et Karel sera Roi avec moi ?" avais-je demandé sur ce ton si particulier, empreint de naïveté infantile. Il avait eu un sourire condescendant en ébouriffant mes boucles blondes.

"Non malheureusement. Il n'est pas magicien comme toi. Il ne peut pas devenir le Roi," tenta-t-il de m'expliquer. Mais la vie de la Cour et la géopolitique dans sa globalité eurent bien du mal à trouver la moindre résonance dans l'esprit de la gamine de cinq ans que j'étais alors. Devenir Reine n'était rien de plus qu'un jeu à mes yeux - comme d'autres enfants jouaient simplement au papa et à la maman.  Néanmoins, une idée avait fini par germer dans mon esprit, et fit son cheminement toute la nuit. Si la magie était nécessaire pour accéder au trône, alors il suffisait de donner des pouvoirs magiques à mon frère pour rétablir l'ordre des choses ; car si je devenais Reine, alors mon frère devait être Roi avec moi. C'était là - selon moi - une qualité typiquement enfantine que celle de trouver des solutions très simples à des situations complexes. Probablement parce qu'à cet âge-là, on n'a pas vraiment idée de la portée de ses actes.


Je n'ai pas réalisé à l'époque ce que cela impliquait pour mon frère ni même pour moi. Il était l'aîné, l'héritier, et j'avais compris que je ne serais jamais que la seconde, la petite princesse, la soeur du Roi, une personnalité certes importante, mais de moindre importance. Quand j'y repense aujourd'hui, cette révélation dont je devais garder le secret n'était en réalité qu'un secret de polichinelle. Jamais un "simple" humain n'accéderait au trône Terran. Mais du haut de mes cinq ans, ces considérations politiques passaient bien au-dessus de ma petite tête blonde. Mon frère serait toujours le Roi de Terra après mon père ; et en cela je l'aimais. Je l'aimais car il me protégeait et veillait sur moi, viendrait me sauver du danger, chassait les chiens qui m'approchaient, séchait mes larmes, même lorsqu'il les avait provoqué ; et surtout prenait ma défense en toute circonstances, couvrant même mes bêtises, souvent puni à ma place quand bien même les adultes n'étaient pas dupes sur l'identité du véritable fautif. Alors pour le garder Roi auprès de moi, j'ai commencé à me poser une question très simple : Comment faire d'un humain un magicien ?

A Childhood Fallacy14 Septembre 742 - Milieu de matinée
Palais Royal - Hystia


Une des erreurs que mon père commettait le plus fréquemment était de penser que tout le monde savait garder un secret, même une gamine comme moi. J'étais parvenue à tenir ma langue durant plus de deux années, d'une part parce que je savais vraiment garder un secret, et d'autre part, parce que je cherchais surtout un moyen pour permettre à mon frère de devenir Roi à mes côtés. Parvenu à l'âge d'homme, je le voyais jour après jour être préparé à régner ; alors qu'il ne régnerait vraiment jamais. Pour ma part, j'échappais encore à ces enseignements-là - j'en boufferais suffisamment les années suivantes - aussi passais-je mon temps libre à fureter dans les couloirs du palais royal, à faire tourner en bourriques pages et valets ou encore à contempler les sommets des Élénides depuis le belvédère du jardin royal.

J'aimais trouver refuge dans les branches des cerisiers qui bordaient les allées du jardin. Je m'y sentais invisible et invincible, dominant toute la vallée d'Hystia de mes noisettes, observant le peuple Terran dérouler les fils de leurs existence à mes pieds. C'est dans l'ombre d'un alcôve cependant que j'ai entraîné mon frère ce jour-là, à l'extrémité des jardins où seuls ceux qui nous cherchaient pouvaient espérer nous trouver. A chacune des interrogations de mon frère, je répondais que c'était une surprise - ou me contentais de lui adresser un sourire complice et espiègle.

"Ferme les yeux... Et tu triches pas hein !?" lui avais-je ordonné en prenant ses mains dans les miennes, puis en les serrant de toutes mes - maigres - forces. Je repensais aux différents contes que j'avais entendu et qui me laissaient nimbée de rêves. Je pensais à mon frère, à l'amour que je lui portais, à lui, ma mère, mon père ; et aussi les Terrans que j'étais appelée à gouverner un jour. Ma mère m'a souvent expliqué que le peuple n'était pas au service de la Famille royale, mais que nous étions à leur service et que notre dévotion à ce devoir devait toujours surpasser nos envies personnelles. Alors Karel devait monter sur le trône avec moi.

"Pactio rex !"


J'ai conclu un pacte avec mon frère, pour qu'il ait de la magie, un pouvoir ; pour que l'héritier légitime soit Roi et moi la seconde - ou que nous soyons souverains côte-à-côte. Mais il ne pouvait en être ainsi, jamais. Après tout Karel, même devenu un puissant pactisant, ne resterait jamais qu'un humain, dans son sang - et surtout dans son sperme - sans parler de la mauvaise image que cela enverrait à nos alliés d'Ignis dont mon père se démenait pour entretenir de cordiales relations. Un humain Roi. Inconcevable pour ce fier Terran descendant direct d'Ignis. Pour ma part, ça ne m'aurait pas gênée outre-mesure de voir mon frère sur le trône, qu'importe sa nature.

Mais mes arguments n'avaient pas de valeur, à sept ans, tu penses bien... Je n'avais que ce secret pour moi. Notre secret, à Karel et moi... Notre pacte. Un secret qui ne perdura guère de temps, lorsque soudainement, mon frère s'était vu capable d'accomplir des faits d'armes et des prouesse physiques réservés aux seuls pactisants. Notre proximité, ma puissance magique et surtout la force de nos sentiments avaient fait de Karel un combattant redoutable. Il ne fallut pas longtemps à mon père pour venir me trouver.


Linked 18 Octobre 742 - Fin de matinée
Palais Royal - Hystia


"Mais qu'est-ce qui t'est passé par la tête ?" hurla mon père en m'attrapant par le bras, serrant avec force mon maigre biceps et m'arrachant des larmes tant de douleur que de trouille.

"C'est pour que Karel y..."

"NON !" coupa sèchement la voix tonitruante de mon paternel.[ color=forestgreen]"Même devenu pactisant, il ne sera pas Roi Ellana ! Ta magie ne doit pas servir à ces bêtises ! Tes réserves de mana, aussi impressionnantes soient-elles, ne t'appartiennent pas ! Cette magie appartient à ton Peuple, à ta nation. Tu dois la mettre à son service, et unique son service ! Est-ce que c'est bien compris ?"[/color]

Mon père me terrorisa littéralement ce jour-là. Je m'étais recroquevillée, pâle comme un linge, prenant dès lors conscience de la bêtise que j'avais commise, et qui se révélait irréparable. Une "bêtise" que je ne regrettais toujours pas aujourd'hui. Jamais je n'ai eu souvenir de voir mon père aussi en colère que ce jour-là, car mon inconscience, au-delà de la réalisation du pacte avec mon frère, aurait pu signer notre mort à tous les deux, ce qui aurait probablement sonné le glas de la lignée des Senyl, et provoqué de nombreuses guerres de revendications entre les différents seigneurs Terrans - sans parler des Ignisiens - pour la succession au trône ; en bref, des préoccupations et des conséquences qui me dépassaient totalement à cet âge. Mais cela allait bientôt venir me percuter de plein fouet.


Ma magie ne devait pas être gaspillée, elle ne m'appartenait même pas en fait, à l'instar de ma destinée et de mon existence. Mon être, mon âme, mon mana devaient être tout entiers voués à Terra, ma nation, mon peuple. Je fus punie, très sévèrement, à ne plus voir mon frère durant des jours, des semaines. Je restais constamment auprès de ma mère, qui approfondissait un peu plus mon apprentissage de la langue ancienne, confinée dans mes appartements de princesse à étudier, me sustenter et dormir. Plus de jeu avec mon aîné, plus de sortie ; même lors des grands banquets, je restais cloîtrée avec Arundel ou Archibald, c'était selon. Mais en réalité, je n'ai jamais été séparée de mon frère une seule seconde. Il était dans mes pensées, moi dans les siennes et nous discutions par télépathie au-travers de notre lien qui se révélait chaque jour un plus fort, plus tenace, même lorsqu'il partit pour Albio - l'école j'entends - deux mois plus tard. Et alors que mon frère partait pour l'école militaire, je commençais à apprendre les usages de la Cour - les vrais - auprès de ma mère et d'Arundel, sans parler de quelques précepteurs royaux, dont le Haut-Mage Virigno.

Rise23 Novembre 742 - Après-midi
Falaises du Thabor - Province d'Isendril, Terra


Je contemplais les à-pics et les profondes gorges qui nous surplombaient - Virigno et moi-même - avec un enthousiasme mêlé d'un respect craintif. Quelle puissance il se dégageait de ces amoncellements de roche, de ces rides plissées calligraphiant la terre d'une histoire venue des temps obscurs. Le long corridor de roche brune magnifié en reliefs escarpés, agrémenté d'une végétation éparse et rabougrie démarquait là l'entrée d'une vallée inhabitée, au climat très rude et aux sols infertiles pour l'agriculture. Une des portes des Élénides, s'ouvrant vers l'un des nombreux massifs les composant. Quant aux raisons qui nous amenèrent ici : pour la première fois de ma vie, je partais en expédition, seule, avec pour unique compagnon mon précepteur de magie : Archibald. Une excursion de trois jours entièrement vouée à l'apprentissage et au perfectionnement de mes sorts. Pourquoi ici ? Au beau milieu de nulle part ? Je n'en avais aucune idée. Les motivations du Haut-Mage défiaient parfois la raison, et la meilleure des réponses était encore de se contenter de hausser les épaules. *Nous verrons bien,* m'étais-je dit en posant la lourde besace à mes pieds avant de m'étirer.

"Et maintenant on fait quoi ?" demandai-je au Haut-Mage.

"On dit 'Que fait-on' Princesse," me corrigea le magicien d'un ton rude, m'arrachant une moue boudeuse.

"Mouais... Ça répond pas à ma question en attendant..." répliquai-je amèrement.

"On grimpe au sommet de ces falaises. Il y a de hauts plateaux, la vue y est splendide. Ce sera un très bon endroit pour nos leçons," maugréa le vieil homme en désignant l'escarpement rocheux du Thabor.

"Mais c'est super haut !" m'exclamai-je pleine de crainte et de désarroi. "Pffffiouu... Je vais jamais y arriver..."

"Tu atteins bien des sommets d'insolence Princesse. Le Thabor n'est qu'une colline verdoyante en comparaison."

"Question de point de vue..."

"Tout à fait," marmonna le magicien en retour, s'asseyant sur le sol et ramassant une poignée de terre humide. "Approche Princesse," m'invita-t-il calmement.

Je le rejoignis, sourcil arqué dans une moue interrogative, mes noisettes braquées sur le petit tas de terre molle, avant de finalement m’asseoir en tailleur face au vieil homme.

"Je t'ai déjà enseigné beaucoup de choses Princesse, vois-tu ; des bases de magie de terre que peu de mages pourraient se targuer d'avoir connu à ton âge. Notre bien-aimée Reine en a fait beaucoup aussi, mais il est une chose que l'on ne t'a pas encore enseignée."

Je l'observais, mon attention toute focalisée sur ses propos. J'étais littéralement pendue à ses lèvres, qui demeurèrent scellées durant d'interminables secondes. Je me triturais les doigts en attendant qu'il veuille bien poursuivre ; mais il ne semblait pas parti dans cette optique...

"Eeeet... ?" l'invitai-je à poursuivre, cherchant son regard orageux qui semblait être perdu dans la contemplation de cette poignée de terre. "Haut-Mage ?" l'interpellai-je.

"Hmmmm ? Oh ! Ah oui..." Il était vraiment... surprenant, pour ne pas dire complètement sénile quand il s'y mettait. "Dis-moi Princesse, comment perçois-tu la magie de terre ?"

Drôle de question. Pour moi, la magie, ce n'était qu'une aptitude à manipuler leur élément, dont certains se servaient pour affirmer leur puissance. Un atout qui pouvait inverser le cours d'une situation, faire basculer des certitudes ; c'était en cela que c'était magique par ailleurs.

"Ben... C'est de la magie quoi... Que j'utilise pour détruire ou protéger, ça dépend des fois... Enfin, je peux m'en servir alors je le fais... Après, la terre, c'est une magie comme un autre..." Virigno sembla exaspéré par ma réponse, comme le manifesta le long soupir qui s'échappa d'entre ses lèvres, et l'air contrit de son visage. "J'ai dit une bêtise ?" demandai-je innocemment, sachant pertinemment quelle serait la réponse.

"Oui. Oui, oui, oui, oui, oui !" s'emporta-t-il. "Une véritable énormité... Non mais quel fatalisme affligeant... Une magie comme une autre ; ce qu'il faut pas entendre... Affligeant, affligeant... Ehol, pardonne-lui..." acheva-t-il de marmonner en secouant la tête. Je vis sa barbe s'agiter frénétiquement, sans pouvoir saisir ses paroles quand soudain la petite motte de terre remua, tremblota, puis se mit à léviter quelques instants, se décomposant en fins éclats boueux avant de se rassembler en une petite statuette à mon effigie.

"L'eau, l'air, le feu..." commença-t-il d'une voix traînante. "De très puissants éléments, mais ayant tous en commun une faiblesse : l'intangibilité. Vois-tu..." - il désigna les falaises derrière lui - "...la terre reste la seule magie qui perdure d'elle-même. C'est en cela qu'elle est symbolique de Terra et d'Albio. Le feu s'éteint, l'eau s'évapore, le vent s'essouffle... Seule la terre résiste au temps démanaïfié, plus que tout autre." Il me tendit la petite sculpture de terre, que je contemplais avec curiosité et précaution tandis qu'il poursuivait. "La magie est un don d'Ehol, que nous devons employer avec respect et parcimonie, pour servir des intérêts plus grands que les nôtres. En cela, nous devons l'utiliser avec la responsabilité d'un fardeau."

"Contrairement à Ignis où leur magie ne sert que le pouvoir ?" le coupai-je d'un ton dédaigneux.

"Ne m'interromps pas, Princesse insolente. Et non, la lignée d'Ignis se moque du pouvoir." - J'arquai un sourcil étonné - "Ne te méprend pas - jamais - sur le pays des flammes. Le pouvoir en Ignis est une conséquence, une récompense ; mais jamais la cause ni le but. Les Ignisiens ne recherchent que la force la plus grande pour dominer. De là, le pouvoir n'est qu'accessoire. Le fort domine, le faible s'incline en Ignis. N'oublie jamais ça."

"Ce pays est vraiment..."

"Ne dis plus rien Princesse. Tu auras tout le temps de te forger une opinion d'Ignis plus tard. Nous sommes ici pour perfectionner ta magie. C'est sur cela que tu dois te concentrer désormais."

"Oui Haut-Mage..." finis-je par m'incliner. Ma petite tête blonde ne parvenait pas encore à saisir toutes les subtilités de ce grand échiquier.

"Bien. De toutes les magies, celle de la terre est la plus polyvalente. Elle est toute aussi créatrice que destructrice. Albio a sculpté ce monde, ce continent, ses richesses, influençant les cours des trois autres éléments ; et bien plus même, malgré que ce savoir ait été perdu. Il est très difficile pour un mage de feu d'utiliser son pouvoir à des fins de création, c'est par ailleurs ce qui rend cette affinité si puissante et si redoutée. En manipulant la roche, tu peux faire s'effondrer une montagne, détruire une cité d'un puissant séisme, mais aussi détourner un fleuve pour irriguer le sol ou dresser une muraille protectrice. Les possibilités d'applications sont infinies, et ne dépendent que de la volonté et la puissance du mage qui la manipule."

"Mais c'est quoi la chose qu'on ne m'a pas encore enseignée alors ?" m'enquis-je avec curiosité, pressant le vieil homme de continuer.

"A part la patience ? On ne t'a pas appris la noblesse de la Terre."

"La noblesse de... la terre ?" répétai-je, incrédule.

"Le sable. A l'image-même de Terra. On ne considère une chaîne que comme étant caractérisée par son maillon le plus faible. Il en est de même pour la terre dont le moindre grain fait partie d'un ensemble, tout aussi insignifiant qu'indispensable. Il n'y a pas de pauvre sans riche, ni de roi sans sujet. La moindre vie de chacun des Terrans a autant de valeur que la tienne ou celle de ton père, car le plus vertueux des hommes n'est rien sans le plus misérable ; et tous deux sont nécessaires à poser les limites, fixer les règles. La plus grande force d'une chose reste le plus souvent sa plus grande faiblesse. En exploitant cela, en l'appliquant à ta magie, elle en deviendra la plus complète et la plus inébranlable ; et alors, rien ne te sera insurmontable... On commence ?"

"D'accord !" m'étais-je exclamée, enjouée.

"Alors on grimpe." Le vieil homme psalmodia quelques bribes de langue ancienne dans sa barbe, et je sentis dès lors le sol trembler sous mes pieds. Par réflexe, je m'accrochais à deux touffes d'herbe grasse tandis qu'une colonne de terre s'élevait dans les cieux ; nous, perchés à son sommet. J'observais le sommet de la falaise se rapprocher à toute vitesse, le Haut-Mage faisant danser ses doigts et ses mains, sculptant la roche comme de l'argile pour finalement faire naître un pont, finement ouvragé, entre le plateau du Thabor et le sommet de la colonne.

"Rien n'est insurmontable Princesse," répéta-t-il dans un sourire complice qu'il m'adressa. "En route !"


Aussi passais-je ensuite les cinq années suivantes à vivre et étudier selon ce rythme : apprendre à devenir Reine le matin ; et la magie de Terre l'après-midi. Vivre au rythme de la Cour, au rythmes des heurts, des joies, des décisions de mes parents, du Sénat, des intrigues propres à la politique, merveilleux monde de faux-semblants et de stratagèmes qui le plus souvent dépassaient le simple idéal de servir les intérêts de Terra et de ses habitants. Durant ces années où je quittais peu à peu le monde de l'enfance et me retrouvais projetée aux portes de l'âge adulte, j'observais avec un regard de plus en plus pragmatique mon père se débattre dans les méandres politico-politiques des eaux troubles du fleuve Sénat, sans parvenir à réellement imposer sa vision et ses idéaux auprès des Sénateurs. C'est à cette époque que commença à germer à moi - nourrie par un idéalisme presque borné et quelques réminiscences de naïveté infantile - cette aversion pour la politique de mon père, et naquit l'étincelle de la provocation qui allait m'habiter, et finir par consumer les relations que j'entretenais avec mon Roi. Une étincelle provoquée par un événement auquel je m'attendais bien évidemment. Le jour où mon père écarterait Karel du pouvoir. Ni les Terrans, ni Ignis ne seraient prêts à accepter qu'une cadette devienne Reine en lieu et place de l'héritier légitime. Sauf que mon père avait oublié un simple petit détail : le Pacte. Si j'y ais cru les premiers jours ? Bien évidemment, jamais il ne m'était venu à l'esprit que mon père pourrait ordonner la condamnation à mort de son propre fils, et envoyer ce dernier vivre une vie non pas de renégat, mais de parfait anonyme, loin de son foyer et sa famille. Un "mal nécessaire." Combien de fois entendrais-je cette excuse au cours de mon existence. C'était un mal nécessaire.


Beyond Two Souls*2 Février 743 - Début de soirée
Jardin Royal - Hystia


Je scrutais la cité qui s'étendait sous les hauts-remparts ceignant le jardin royal, accoudée entre deux créneaux du belvédère, le visage totalement fermé. Je grelottais de froid, encore habillée de ma robe de procession, ayant abandonné mon manteau sombre et détrempé sous l'assaut des flocons de neige à même le sol gelé. Cet après-midi avaient eu lieu les funérailles de mon frère, et la cité toute entière s'était drapée de blanc, de noir ou de gris ; drapeaux et oriflammes en berne, la nation faisait le deuil de son prince.

Toute l'après-midi j'avais suivi le carrosse qui portait le cercueil - vide de tout corps - de mon frère du pied d'Hystia jusqu'au mausolée royal, creusé à même la roche du Mont Viso où la capitale s'était nichée. J'avais tenu la main de ma mère tout le long de la procession, piétinant la neige fondue que les pas de milliers de Terrans derrière nous achevaient de faire fondre. La foule chantait, psalmodiait ou se taisait au rythme des heures et des lacets qui défilaient. En plus d'être le pire jour de ma vie, il se révélait le plus long.

J'avais pleuré toutes les larmes de mon corps, et même en cette heure tardive, sans avoir bu ni avalé quoi que ce soit, je ne pouvais empêcher mes larmes de continuer à rouler sur mes joues. Un silence pesant régnait sur la cité en cette soirée morne. C'était peut-être ça le pire : ne plus entendre l'agitation de la vie nocturne gagner les rues, comme si la vie elle-même s'était arrêtée. Et pourtant...

"Ellana ? Mais qu'est-ce que tu fais dehors dans cette tenue ? Tu vas attraper la mort enfin !" s'inquiéta Arundel, ma gouvernante, jetant son propre manteau sur mes épaules sans considération pour sa propre personne. "Viens. Rentrons vite au chaud. Ton père tient à te parler et te cherche partout," dit-elle en m'attrapant par les épaules.

"Karel n'est pas mort," ai-je soudainement affirmé, la voix emplie de sanglots en secouant la tête. "Je le sais, je le sens. Il n'est pas mort. Je sens toujours sa présence, notre lien," expliquai-je en pointant mon sceau du doigt.

"Ellana ma chérie..." commença Arundel en s'agenouillant pour être à ma hauteur, et plonger ses yeux gris au cœur des miens. "...j'y connais pas grand-chose en magie, mais je suis sûre que Karel continue de veiller sur toi, aux côtés d'Ehol et d'Albio." Je me dégageai de son emprise en secouant la tête avec véhémence.

"Non ! Ce n'est pas ça !" insistai-je, les yeux embués de larmes, tant de tristesse que de colère. "Il n'est vraiment pas mort. Il a juste disparu. Peut-être qu'il est prisonnier des pirates, qu'il nous attend, mais il est vivant ! J'en suis certaine !"

Ma confidente afficha un sourire attristé en me dévisageant longuement, puis m'enveloppa de ses bras, sa main gauche plongée dans mes cheveux détrempés, attirant mon visage dans le creux de son cou - elle sentait la rose et la lavande - et me susurra à l'oreille d'une voix secouée de sanglots :

"Pleure, ma chérie. Pleure ton frère et pleure ton amour."

Alors j'ai pleuré à chaudes larmes, à nouveau, serrant le col de la robe d'Arundel entre mes poings aux jointures blanchies. J'avais mal au cœur, mal au bide - une douleur sourde, mais physiquement insupportable - je voulais hurler ma rage, clamer mon déni autant que ma colère. Il ne pouvait pas être mort, c'était impossible. Alors je hurlais ma peine et ma tristesse en m'effondrant dans les bras de ma gouvernante. Un hurlement haché qui fit écho contre les flancs du Mont Viso. Mon étreinte dura de longues minutes, accompagnant mes plaintes et mes lamentations, jusqu'à ce que mon père finisse par débarquer dans le jardin royal, talonné par ma mère.

"Laissez-nous Arundel, je vous prie," demanda-t-il poliment, attendant qu'elle s'exécute avant de me toiser d'un regard étrangement sévère et assez peu attristé finalement. Un constat qui me choqua, tant l'amour qu'il nous portait étant grand. Mon père - Roi de Terra - avait-il à ce point changé, usé par des années de règne, au point de ne pas pleurer son fils disparu ? Mon regard glissa vers ma mère, qui partageait ma détresse quant à la disparition de Karel, pinçant la lèvres en attendant que mon père ne parle enfin.

"Ellana..." commença-t-il, cherchant la manière la plus adéquate de tourner sa phrase. "Je comprends et je partage ta peine et... Et ta douleur mais..." C'était bien la première fois que je voyais mon père hésiter autant ; et ce mais laissé en suspens ne me laissait rien augurer de bon quant à la suite du discours. "...Mais il ne sied pas à une princesse royale d'afficher ses sentiments de la sorte," acheva-t-il rapidement et le ton bien plus dur que quelques instants auparavant. Il s'était réellement débarrassé de la besogne à la va-vite, sans vraiment prendre en considération l'impact de ses mots à mon égard. J'étais choqué, abasourdie par ses propos. Mes larmes et mes cris n'étaient pas le fruit d'un caprice de gamine pré-pubère ; je venais d'enterrer un cercueil vide censé contenir l'esprit de mon défunt frère. Je croisais à nouveau le regard de ma mère, aussi choquée que moi, puis sa langue claqua contre son palais.

"Ellana mon ange. Regagne tes appartements je te prie,"  m'invita-t-elle aimablement, bien qu'articulant lentement chaque syllabe de chaque mot. Je connaissais ce ton, ce langage, ce regard fixe soutenu de quelques frémissements de narines, où ses maxillaires saillaient sous ses traits pourtant délicats. Ça allait chier dans la suite royale. J'inclinai respectueusement la tête, le visage encore rouge et humide.

"Oui mère." Eliwan Senyl était sûrement la femme la plus douce et la plus patiente de tout le royaume, mais ses très rares colères étaient à la hauteur de sa bienveillance : légendaires. Tout ce que je pu saisir de la suite de la conversation fut un : "Edwiiiiin..." particulièrement âpre et traînant ; quant à moi, j'allais éponger mon chagrin dans mes oreillers.


A compter de ce jour funeste, de cette discussion où mon père me démontra froidement quelle devait être le comportement d'un souverain, le visage que ce dernier devait arborer même dans les situations les plus difficiles, les épreuves les plus douloureuses, afin d'assumer la figure et le symbole inébranlable qu'était la Famille Royale de ce pays ; à compter de ce jour, je compris mon rôle, j'en saisis pleinement les responsabilités et les devoirs qui allaient m'être quotidiens une fois mes parents disparus eux-aussi. La disparition de Karel m'avait arraché bien plus qu'un frère, bien que sa présence restait quotidienne et que je le savais bien vivant, quelque part, elle emporta avec elle entre ses froides mâchoires une très grande part de mon innocence, et aussi de ma joie de vivre. Car au-delà des quelques mois qui suivirent la disparition de mon aîné où mon esprit errait hagard sous les assauts quotidiens de mes souvenirs, je perdis cette faculté à me réjouir d'un rien, à m'émerveiller d'une banalité, à sourire pour faire bonne figure. Je n'en perdis pas les émotions, cela serait mentir - aux autres autant qu'à moi-même - que d'affirmer cela, mais je pris l'habitude d'enfouir au plus profond de moi mes pensées les plus négatives, mes faiblesses les plus évidentes, pour n'afficher que ce masque aux yeux de tous : la Princesse Ellana sera le symbole, la fierté, l'incarnation de l'âme de Terra. Je représenterais la voix et la parole de chaque Terran sur le continent. Une nation de barbares, de rustres, de guerriers incultes et sous-développés à la botte d'Ignis ? Non. Terra était une terre souveraine, une terre de devoirs et d'honneur, mais une terre de liberté et de tolérance. Je me faisais la promesse de combattre la corruption de notre Sénat et de mener Terra vers son âge d'or, où les rancœurs des temps passés ne viendraient plus obscurcir le jugement des décisionnaires, où la crainte du royaume des flammes ne hanterait plus les esprits des Sénateurs.

A compter de ce jour, je reniais toute ascendance Ignisienne et décidais de combattre cette alliance pour asseoir la souveraineté et la légitimité du Royaume que j'allais gouverner. Mais cela prendrait du temps... Beaucoup de temps... Et mon temps n'était pas encore venu.

Mais en attendant, il était temps pour moi d'être initiée à autre chose, de me tourner vers ce qui faisait la réputation de Terra, l'outil le plus puissant de mon royaume, et sur lequel j'aurais une liberté de décision presque absolue : l'armée. Désormais parfaitement instruite des us et coutumes de la Cour Royale, que j'aimais par ailleurs transgresser - après tout, il y a une différence majeure entre ignorer et transgresser - et maîtrisant suffisamment ma magie, vint le temps pour moi de faire mon entrée au sein de l'école d'Albio afin d'y recevoir une instruction militaire digne de la souveraine en devenir que j'étais.


What We Are Fighting For... 5 Janvier 748 – Milieu de matinée
École Militaire d'Albio


Le sable. Le sang. La sueur. Trois saveurs qui n'ont réellement envahi mon palais et pris leur sens qu'à l'école militaire d'Albio, lorsqu'enfin j'y partis faire mon apprentissage martial. J'avais toujours considéré la force et la violence comme des méthodes ignobles – et Ignisiennes – de rendre la justice ; mais étrangement rapportées à mon instruction militaire et à l'étrange plaisir de combattre, je considérais ce recours comme étant le seul susceptible d'être entendu par Ignis. Bien sûr, ma magie seule pourrait largement suffire à leur faire comprendre, mais je voulais goûter leur sang, le sentir ruisseler le long de mes doigts, être poisseuse d'hémoglobine, sentir le sel de la sueur me piquer la langue et les yeux, et la satisfaction de la victoire me brûler les entrailles. Mais en attendant...

''Relève-toi Princesse !'' brailla mon instructeur, dont mes noisettes n'apercevaient que les bottes en cuir. Je sentais le sable de l'arène d'entraînement coller à ma joue poisseuse et se mêler à mes cheveux. Chacun de mes muscles étaient brûlants, gonflés sous l'effort, le poids de ma lame émoussée, de mon gambison et des attaques portées par l'instructeur Terence. Chacun de ses coups me faisaient presque chavirer, mettant mon équilibre à rude épreuve, faisaient vibrer mes os, mes bras. Ma respiration était chaotique ; bref, j'étais une bleue, et mon sang royal ne me conférait aucun traitement de faveur. Le respect au sein de ses murs ne se gagnait pas par le titre, mais par la bravoure, l'ardeur au combat, le travail et la dévotion. Pour la première fois de ma vie, je n'étais plus l'héritière, la représentante du peuple et du royaume de Terra. Je n'étais plus l'arbre qui dissimule la forêt, mais une des nombreuses feuilles qui la composent. Une simple gamine de quatorze ans, l'égale de ses pairs, une aspirante comme une autre ; et c'était un véritable soulagement à chaque instant que d'être ici, avec eux. 'Princesse' n'était pas mon titre ici, mais mon surnom, tout comme on appelait l'aspirant Vor'Ech 'le Borgne' ou la jeune Fridhilde 'la Flèche'. C'est au sein de ces murs que je me sentais la plus proche de mon frère. Le lien qui nous unissait résonnait en moi comme s'il avait été à mes côtés, et dans l'épuisement parfois, j'avais l'impression de partager ses sentiments. L'amour qu'il me portait était si fort que je ne me sentais jamais seule. Ce lien de mana me rappelait sans cesse à moi-même que je n'avais pas le droit de rester au sol, le devoir de continuer. Alors je me relevais une énième fois...

Redressant mon épée, rétablissant ma garde, je faisais de nouveau face à Terence, plus déterminée à chaque fois. Mon esprit tâchait d'oublier le tumulte des lames qui s'entrechoquaient autour de moi, les cris rageurs et douloureux de mes compagnons d'armes s'entraînant – se faisant démonter en vérité – contre les vétérans de l'infanterie Terrane. Un cri rauque s'échappa de ma gorge tandis que les semelles de mes bottes soulevaient une nuée de sable à la suite de mon élan. Le levais ma lame au-dessus de ma tête, ouvrant ma garde et me découvrant totalement face à mon instructeur. Je comptais lui porter un coup puissant, lui faire goûter ma force de caractère bien avant ma force physique – puisque de ce point de vue là, je n'avais pas le moindre espoir de le dépasser un jour – lui montrer que la 'Princesse' avait du chien, lui donner envie de se battre pour moi, ma famille, mon pays – notre nation – lui faire comprendre que je ne l'abandonnerai pas même une fois retournée au dernier niveau d'Hystia.

Il m'a démoli...

Une simple esquive – un quart de tour – suivie d'un direct du droit en plein estomac. Même la protection matelassée de mon gambison n'avait à peine pu amortir le choc. C'était comme si un bélier de siège venait de me faucher, et je m'écroulais une nouvelle fois sur le sol, hoquetant, cherchant autant à retrouver mon souffle qu'à retenir le contenu de mon estomac. Terence m'avait littéralement séché. Il me retourna d'un coup de pied, avant de se pencher sur moi, une expression dédaigneuse sur le visage.

''Le rentre-dedans, c'est bon pour les putains...'' m'a-t-il balancé au visage. Terence n'était pas l'incarnation de la subtilité en ces murs, mais au moins ses mots étaient-ils aussi percutants que ses poings. Alors je me retournais, repliée sur moi-même avant de me redresser une nouvelle fois, bien moins fière que quelques instants auparavant. Trois jours que j'étais entrée à Albio, trois jours que j'en mangeais plein la tronche, entre les parcours d'obstacles, les réveils au beau milieu de la nuit, le maniement des armes ou l'apprentissage de la stratégie. Trois jours déjà, trois jours seulement, où je reprenais véritablement goût à la vie, où je saisissais – par la manière forte – pleinement le sens de ce qu'était Terra, ce qui faisait la nation que j'étais appelée à gouverner un jour.

''T'es parée Princesse ?'' me demanda l'instructeur en me jaugeant des pieds à la tête, se remettant en garde pour m'accueillir d'une joyeuse raclée ; je le pressentais. J'acquiesçai d'un hochement de tête, encore trop assommée pour répondre de vive voix, même dans un murmure.


Le quotidien s'installa rapidement durant ma formation militaire. Un quotidien qui se voulait riche en émotions, en coups durs, en souffrances, mais surtout et avant tout, en compagnonnage. La future reine de Terra côtoyant les enfants des lignées nobles venus de toutes les provinces Terranes au même titre que la progéniture roturière, fils et filles d'artisan ou d'éleveur présentant d'excellentes aptitudes leur ouvrant l'espoir d'une carrière prometteuse au sein de l'armée. Passés les premiers jours, où la timidité nous cloisonnait chacun dans nos quartiers, les vétérans eurent tôt fait de nous mettre au pli. Au sein de l'armée, au sein de l'école, nous laissions notre statut social, notre rang, notre nom devant la porte. Nous devenions tous des frères d'armes, des enfants de Terra et d'Albio, les fils de nos existences à l'image de nos quotidiens étaient désormais liés. Et nous partageâmes, au bout de quelques semaines, des épreuves et des peines communes.

Influenza12 Février 748 – Milieu de la nuit
Palais Royal – Hystia


Je me trouvais au chevet de ma mère, dont le visage était désormais apaisé. Toute la soirée je l'avais trouvé véritablement marquée par la fatigue. Jamais je ne l'avais vu aussi exténuée, même au cours de nos nombreux voyages diplomatiques durant parfois des semaines. Cela faisait maintenant deux semaines que la capitale Terrane avait été frappée de plein fouet par une épidémie de grippe extrêmement virulente, emportant dans son sillage des milliers d'âmes. Les frontières avaient été fermées, les navires présents dans les ports avaient ordre de rester aux amarres, la flotte Terrane imposant un blocus à l'encontre de tous les navires approchant, quel que soit le pavillon battu. Écoles, églises et temples, casernes... Tous les lieux et services publics furent fermés ; et tous les médecins et magiciens d'eau de la nation furent envoyés pour tenter d'endiguer l'épidémie. Au final, seuls les êtres dans la force de l'âge et les villages les plus isolés furent épargnés par la grippe - que nous appellerions plus tard la Grande Grippe – et celle-ci fini par s'éteindre à une vitesse presque aussi grande qu'elle n'était apparue.

Ma mère, fidèle à ses préceptes, avait donné toute son âme et son énergie à la préservation de la vie des Terrans, dont la mienne. Elle avait beaucoup trop donné pour son pays, puisant dans son mana et son énergie vitale pour nous arracher – moi comprise – hors des miasmes de la mort, afin que nous ne nous retrouvions pas emportés par le cours de la Rivière de Vie trop tôt. Celle-ci avait dès lors exigé des sacrifices. Nombre de magiciens d'eau avaient fini par mourir d'épuisement, et ma mère n'allait pas tarder à les rejoindre.

Ainsi donc je me trouvais au chevet de ma mère, aux côtés de mon père effondré par le chagrin. Les mains croisées devant moi, ma main droite serrait ma main gauche à en faire blanchir et craquer les articulations. Mes mâchoires étaient à l'image de mon visage, fermé. Je me mordais les lèvres pour ne pas pleurer, sentant cette boule de chagrin me nouer la gorge, peser sur mon être tout entier ; débordante jusqu'à inonder mon regard de larmes posé sur le visage au teint d'albâtre de ma défunte mère. Je déglutis avec difficulté en sentant les mains de mon père se poser sur mes épaules, enserrant mes trapèzes dans une étreinte de tristesse communicative.

''Tu es bien la dernière merveille qu'il me reste à présent, ma fille...'' Il renforça son étreinte dans un reniflement. ''… puisse Albio te donner la force de surmonter cette épreuve.''

Je posai ma main droite sur celle de mon père en retour, caressant ses doigts massifs et calleux.

''Ça ira, père,'' articulai-je difficilement. ''Je suis sûre que mère... veillera sur nous... qu'elle sera... sera près de nous...'' Je sentis les doigts de mon père s'enfoncer dans mes épaules alors qu'il luttait pour contenir sa violence, sa colère, sa rage... Une chance pour moi que les premières semaines passées à Albio m'avaient initié à ce qu'était vraiment la douleur physique.

''Puisse Albio t'entendre ma fille... Puisse Albio t'entendre...'' murmura-t-il d'une voix brisée avant de déposer un baiser sur le sommet de mon crâne. Cela faisait de très nombreux mois que mon père ne m'avait pas montré un tel geste d'affection. Un geste qui me bouleversa – m'ébranla même – jusqu'au plus profond de mes tripes. Je me retournai soudainement vers lui, levant mes yeux embués de larmes vers son visage barbu – aussi accablé que le mien – puis j'enveloppai sa taille de mes bras, craquant finalement et pleurant contre son torse, les dents toujours serrées pour ne pas hurler mon chagrin. Sa main caressa l'arrière de ma tête, glissant dans mes cheveux en me serrant contre lui.

''Pleure ma fille... Pleure une dernière fois... Car face au prochain tombeau, tu seras Reine.''

''Oui père,'' avais-je fini par sangloter entre deux poussées de larmes. J'avais manqué à ma volonté, à ma promesse de ne pas pleurer, ne pas craquer, mais la peine était trop immense.

''Tu es mon dernier trésor...'' avait murmuré mon père, son menton hirsute chatouillant le sommet de mon crâne. Je n'avais rien dit, même si la pensée que Terra serait son éternel trésor. Après une vie passée à régner sur notre patrie, une existence entière dévouée à son peuple ; je ne pouvais lui faire remarquer de réduire sa peine à sa seule personne, de se préoccuper – quelques heures seulement – de son chagrin tout personnel. Quel homme, quel Terran, aurait-eu l'audace d'oser ?

''Je t'aime papa...'' avais-je finalement répondu sur le même ton, presque éteint.



Ellana Senyl
Ellana Senyl
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Sam 24 Mai - 17:17
Histoire II

Les semaines qui suivirent le décès de ma mère furent très probablement les plus sombres de l'histoire du règne de mon père. L'homme transparaissait de plus en plus souvent sous le masque craquelé du souverain qu'il s'imposait, que nous nous imposions tous désormais. Plus violent, plus colérique, plus acerbe dans ses propos et ses décisions, il fit naître et alimenta de très lourdes tensions entre les différents Seigneurs de guerre et vassaux du Royaume, qui espéraient profiter de la position de fragilité de mon paternel pour s'octroyer quelques privilèges supplémentaires auprès du Sénat. La balance déséquilibrée, il ne fallut guère de temps pour qu'un vent de protestation souffle de plus en plus fort sur les hautes sphères de la vie politique Terrane. Pour ma part, je n'avais d'autre choix que d'y assister de très loin, me retrouvant de nouveau au cœur de l'Ecole Militaire d'Albio, presque coupée du monde et de la vie extérieure, n'apprenant les nouvelles que par rumeurs interposées. Difficile à cette époque, et à mon âge, de trier le vrai du faux. Tout ce que je savais – une idée qui ne m'avait jamais quitté – c'était de terminer mon cycle de formation en étant l'une des meilleures. Je voulais être la meilleure, afin de prouver à tous que je serais digne de succéder à mon paternel, digne du trône et digne de les diriger.

Il serait totalement faux de dire que les épreuves ne m'affectèrent pas. Le décès de ma mère me laissa pantoise et hébétée durant de nombreux jours, et l'instructeur Terence s'était acharné à me maintenir l'esprit occupé loin de mes préoccupations. Il m'en avait fait baver le bougre. Nous en avions tous bavé durant le printemps. Il nous avait épuisé, écrasé, et pourtant maintenu suffisamment alertes pour que nous trouvions toujours la volonté et la force de nous redresser. Nous surpasser d'abord, vaincre ensuite...


What We Are Fighting For... II7 Septembre 748 - Fin de matinée
École Militaire d'Albio


J'étais épuisée, le souffle court, haletant. Mon épée tremblait dans ma main, simple prolongement de mon bras. La sueur ruisselait à grosses gouttes le long des arêtes de mon visage, mais je souriais ; mes noisettes contemplant la pointe de mon épée maintenue fébrilement à quelques centimètres à peine de la gorge de l'instructeur Terence. Enfin je le battais. Enfin je le désarmais et le tenais sous mon joug. Impossible de décrire l'intensité de la joie et de la satisfaction qui me tenaillaient les tripes, mais c'était bon, très bon. La victoire était une sensation vraiment exquise, grisante.

L'instructeur eut un rictus plutôt nuancé, entre la grimace de la défaite et le plaisir de me voir progresser. Il repoussa ma lame d'un revers de son gantelet, puis se releva lourdement.

''Joli combat Princesse... T'es bien la première à me faire mal cette année... Je commençais à désespérer...''

''Désolée...''

''T'excuse pas gamine !'' brailla-t-il de sa voix de stentor éraillée. ''La souffrance du combat, c'est justement ce que je recherche. Ça faisait longtemps qu'un merdeux n'avait pas eu l'impertinence de me coller une bonne branlée,'' avoua-t-il avant de ricaner, plongeant sa main dans une des besaces accrochées à sa ceinture pour en extirper une petite flasque.

''Cuvée spéciale des Necker, descendue droit de mon vallon natal,'' m'expliqua-t-il avant d'en boire une gorgée. Je savais que Terence était un natif d'un village de haute altitude enclavé au fin fond d'une vallée reculée des Élénides, près des contreforts des Infranchissables, mais mes connaissances sur le passé et la carrière de mon instructeur s'arrêtaient à peu près là.

''La tradition veut qu'on partage la boisson avec celui qui vainc, pour sceller la fin de l'affrontement.'' Il me tendit la flasque, dont je m'emparai avant d'en renifler le goulot d'un air suspicieux.

''Ça a l'air fort. Je ne sais pas si...''

''Tu vas pas me faire l'affront de refuser Princesse ? C'est juste des plantes, un rien macérées.''

''Non. Non... Euh... Avec plaisir alors...''

J'avalai une gorgée – une toute petite gorgée – de la boisson, et manquai de m'étouffer avec. L'alcool me brûla la gorge, je le sentis descendre au cœur de mes entrailles aussi sûrement que si Iskandar lui-même était venu déverser un torrent de flammes dans mon œsophage. Mon teint d'albâtre vira au pivoine presque instantanément, ma tenue d'entraînement me semblait tout-à-coup insupportable, trop chaude, étouffante. Je toussai, les larmes au bord des yeux.

''Putain l'enfoiré...'' soufflai-je d'une voix rauque et éteinte alors que Terence riait aux éclats, attirants l'attention des combattants alentours, aspirants comme instructeurs.

''Ça décape n'est-ce pas Princesse ?'' demanda-t-il entre deux éclats de rire ; remarque accompagnée d'une bonne claque sur l'épaule qui faillit bien m'envoyer au sol. ''Te v'là dépucelée du gosier Princesse... Allez ! File au baquet te décrasser. Tu dégages une odeur digne des bas-fonds de Lex,'' m'ordonna-t-il d'un ton bourru.

''A vos ordres instructeur,'' ai-je obéis avec empressement ; et tandis que je m'éloignais vers la salle d'eau pour me nettoyer, je l'entendis brailler aux autres aspirants, sa voix dominant la cour d'entraînement.

''Alors les puceaux !? Vous allez laisser une gamine vous surpasser ? C'est quand même pas la Princesse qui va venir combattre pour vous, non !? Alors remuez-vous un peu le cul tas de fiottes !!''

Voici ce qu'était Terra. Un pays d'hommes et de femmes farouches, combatifs et déterminés ; suant sang et eau pour leur patrie. Et par ma maigre victoire d'aujourd'hui, j'y prenais pleinement part, plus Terrane que jamais. Oui... La victoire avec un goût exquis. Enivrant et graveleux certes, mais exquis.



Au cours des années qui suivirent, je poursuivais mon entraînement et mon éducation aux plus hautes valeurs et techniques guerrières, passant en revue toute la stratégie militaire et ayant droit à des cours beaucoup plus poussés sur la diplomatie Terrane, la géo-politique qui régnait sur le continent ainsi que les positions et valeurs défendues par notre patrie au-travers du monde. Quand mes compagnons d'armes avaient quartier libre, je restais pour ma part enfermée avec les plus grands tacticiens et diplomates du pays. Je faisais la connaissance de nombreux Sénateurs et leurs descendants, j'apprenais quelles étaient les lois régissant notre patrie, les liens que nous entretenions avec nos vassaux les plus éloignés, ceux qui avaient choisi de servir Terra aux frontières Occidentales et Septentrionales avec Ignis, Ventus et Aquaria. Quelle était la place que nous étions supposés occuper et tenir dans ce bas-monde, et quels étaient les enjeux en cours et à venir pour ma patrie. Petit à petit, j'acquérais toutes les connaissances qui me seraient nécessaires pour accomplir ma tâche avec le plus de cartes en mains, et le plus d'atouts dans mes manches. Car le jour viendra où...

The Fourth25 Août 755 – Début d'après-midi
Basilique d'Albio - Hystia


Si depuis mes dix ans j'assistais à grand nombre de cérémonies, d'adoubements, de séances politiques et de doléances, affrontant nobles, sénateurs, chevaliers, soldats et même la population ; jamais je n'avais ressenti une telle angoisse, presque muée en terreur. Une terreur dont je me faisais violence de dissimuler aux yeux de tous, car aujourd'hui, un mois après la disparition de mon père, je prenais officiellement la tête de la nation. Aujourd'hui, je devenais la quatrième Reine de Terra, devant les plus haut-gradés de l'armée, le Grand Général, les Sénateurs les plus influents, les plus puissantes familles nobles du royaume. Mes noisettes cherchèrent Warnoch du regard, le Garde Royal avec qui j'entretenais des relations depuis mes treize ans. Un homme de grande valeur, qui partageait nombre de mes idées et de mes convictions ; et en qui j'avais une confiance absolue. Je le trouvais enfin, dans un coin de la basilique près d'une colonne, l’œil aux aguets, l'esprit alerte. Je me sentis presque immédiatement rassurée, alors que la pression se faisait de plus en plus oppressante sur mes épaules.

Je ressentais aussi la présence de Karel. J'avais croisé le Chevalier Noir lors d'une cérémonie de la Garde Royale. J'avais observé cette armure de jais, parfaitement noire et lisse. J'avais reconnu Arondight entre ses gantelets, je l'avais ressenti, au-travers de notre pacte, face à moi ; et je n'avais rien dit, pas émis la moindre pensée. Je m'étais efforcée de taire notre lien, de libérer mon frère de sa culpabilité et de le laisser libre d'agir et prévenir. Et aujourd'hui, je savais qu'il se trouvait là, dans l'ombre de la basilique à me protéger. Et le laïus du prêtre Albionniste qui n'en finissait pas... Je bouillais sur place alors qu'il bénissait l'eau du sacre en psalmodiant quelques versets du Magna Carta.

Tous ces chichis protocolaires avaient le don de m'exaspérer au plus haut point, et pourtant... Je me devais de faire avec. La basilique était noire de monde, l'atmosphère – combinée à la chaleur du mois d'Août – eut vite fait de devenir étouffante, ce qui n'arrangeait en rien cette pression accablante. Car la réalité était désormais devant mes yeux, et la prise de conscience qui allait avec : je devenais Reine de Terra. Cela faisait des années que je me préparais à l'événement, encore plus depuis la disparition de mon père le mois dernier ; et pourtant, je ne me sentais pas prête. Le devenait-on réellement un jour ? Était-on prêt à devenir parents ? J'en doutais fortement... On avait beau tout faire pour s'y préparer, on se retrouvait démuni face à la réalité quand celle-ci venait vous gifler en pleine trogne. Je savais quel était mon rôle, quelle était ma place, j'avais étudié des années durant pour accomplir cette tâche que le destin m'avait imposée à l'aube même de ma naissance. Et après tant d'années à préparer le fameux ''jour où...'', je me révélais totalement terrifiée de le tâter enfin, de le voir venir. Mon père avait-il ressenti la même chose le jour de son accession au trône ? Jamais nous n'avions abordé le sujet. Je n'y avais même pas songé à dire vrai...

''Votre Altesse... Approchez je vous prie,'' m'invita l'archevêque d'Albio, un sourire de connivence sur les lèvres. Au fond de lui, le vieil homme d'église n'avait jamais apprécié l'histoire du lien transcendant que j'avais avec mon frère. Un frère que je savais présent aujourd'hui, non loin de moi, sa bienveillance planant sur l'assemblée de la basilique. Je m'approchais finalement du bain de sacre, le visage fermé, mes noisettes ne se détachant pas de la foule. Ma terreur intérieure ne devait pas transparaître ; à aucun moment. Aujourd'hui, je n'étais pas une fille de Terra, ni même la princesse ou la Reine de la nation, j'en étais l'incarnation, le symbole ; et à ce titre, je me devais d'être aussi inébranlable que les fondations d'Albio même. J'entrais dans le bain, lentement, le tissu de ma robe de sacre collant presque instantanément à ma peau, avant de m'agenouiller dans l'eau. Le serment... Il me fallait prêter serment maintenant.

''Moi, Ellana Senyl, quatrième Reine de Terra, fais le serment en ce jour de porter la couronne du royaume, et de porter à travers-elle les responsabilités et les valeurs de notre patrie, de la servir et de la protéger, de prendre les décisions lui assurant prospérité, sécurité, gloire et honneur tout au long de mon règne, dans le respect de nos coutumes et de notre morale.''

Je marquai une pause dans mon serment, observant l'assemblée avec attention. Ma peur s'était muée en fierté au rythme des syllabes quittant mes lèvres. Puis j'enfonçai le reste de mon corps dans le bain, jusqu'à être totalement immergée. Le calme sous l'eau était si reposant. Je sentais mon esprit flotter dans ce maigre espace aqueux, savourant là les derniers instants de ma vie de  princesse. Quand ma tête jaillirait du bain, elle serait couronnée. Alors autant profiter de ces tout derniers instants de solitude.

*Père. Mère. Puissiez-vous me garder d'échouer et vos âmes être comblées de fierté.*

Ma tête jaillit hors de l'eau, et je pris une grande inspiration.

''Amor patriae nostra lex.''


Que s'est-il passé par la suite ? Je pense que chacun le sait, plus ou moins, à sa manière et selon ses origines, ses connaissances et ses fréquentations. Selon son intérêt personnel pour les choses de la couronne aussi, cela va sans dire.

Très rapidement, je me retrouvais confrontée au Sénat et ses occupants. Très rapidement, je me retrouvais confrontée à une réalité qui n'avait fait que me frôler tout au long de mon existence : le jeu du pouvoir et la manipulation. Je me rendais pleinement compte que mes parents avaient longtemps fait tampon entre ma perception du monde politique et ce qu'il était réellement. Avant le couronnement, je n'étais pas vraiment décisionnaire. J'avais bien mes avis et mes principes, mais ceux-ci n'avaient pour ainsi dire aucune valeur. Désormais, chacun de mes idéaux portait un fardeau bien plus grand : celui de la responsabilité. Mes choix, mes combats, mes principes se retrouveraient appliqués à l'ensemble de la nation si le Sénat les approuvaient. Fort heureusement pour moi, je pouvais compter sur quelques alliés de poids au sein de celui-ci pour m'assister et me soutenir dans le cœur de mes décisions.

Jour après jour, j'ai réellement appris à dompter le trône et ses exigences. Mes nuits s'étaient vues raccourcies de nombreuses heures, mon esprit n'était jamais libre, toujours à cogiter sur une multitude de problèmes qui se révélaient chaque jour. Chacune de mes décisions, chacune des propositions de lois et de décrets adoptées ou rejetées par le Sénat se voulait suivie de son contingent de conséquences sur le plus ou moins long terme. Envoyer des diplomates vers Ventus pour espérer pouvoir implanter une ambassade permanente à Omnia fut la première décision d'envergure que je réussis à faire adopter par le Sénat. Il m'avait fallu presque une année entière de négociations et d'arrangements politiques divers pour finalement parvenir à rallier à mon point de vue les trois cinquième du Sénat. Officiellement, c'est une décision d'ouverture prise par le Sénat  portant sur le commerce extérieur visant à renforcer l'économie Terrane ; officieusement, c'est avant tout le premier pas que j'espère bénéfique vers une collaboration entre nos deux nations, loin des souvenirs d'une guerre qui ne concerne plus que les générations les plus anciennes de nos pays. Après tout, je conservais toujours mon très fort mépris à l'égard d'Ignis, bien que j'eus appris à ne pas l'ébruiter et à garder cela pour moi. Le début de mon règne fut-il marquant pour les esprits ? En quelque sorte. Luttant contre la corruption du Sénat, proposant de nouvelles aides sociales pour favoriser l'éducation de la jeunesse Terrane, nomination d'un nouveau Chef de la Garde royale – en la personne de Warnoch Arthwÿs - nombreuses propositions de lois pour réformer les infrastructures des services publics royaux, et de très nombreux autres projets que j'avais imaginé bien avant mon couronnement, des travaux de grandes envergures pour améliorer les grands axes du royaume, développant les routes commerciales et négociant même un budget plus conséquent pour la marine marchande et militaire de Terra.

Les décisions les plus tonitruantes et contestées furent celles portant sur le mécénat d'artistes Ventusiens, peintres, sculpteurs et architectes venus du pays du Vent pour que les cultures extérieures aient aussi des accès auprès de la population Terrane. D'aucun m'ont accusé de renier là – voire de trahir, certains n'ont pas peur d'être ridicules – les racines-mêmes de notre culture et de notre patrie, alors que celles-ci restaient au cœur de mes préoccupations quotidiennes ; jusqu'à la plus contestée de toutes, et probablement la plus importante...


A Sword For A Throne21 Novembre 760, Quartier Général.

Cela faisait maintenant quelques mois que l'affaire me pendait au nez, lorsque j'avais reçu cette missive du Seigneur Hornst trois jours auparavant, promu Grand Général sous le règne de mon père et souhaitant aujourd'hui prendre une retraite amplement méritée dans ses terres, sur les rivages Orientaux de Terra. Comment aurais-je pu le lui refuser ? En tant que Reine de Terra, je me devais de rendre honneur aux décennies de dévouement et à la loyauté inflexible du vieux soldat. Une cérémonie serait bien entendu organisée pour la passation de pouvoir, féliciter le néo-nommé et remercier le Grand Général sortant. Une occasion rare, et un jour de fête en perspective pour les soldats et la population. Mais bien avant cela, encore fallait-il le trouver ce fameux successeur ; et la tâche se révélait des plus ardues tant chacun souhaitait y aller de son petit commentaire, poussant sur le devant de la scène de manière plus ou moins subtile le poulain familial, l'ami ou l'allié politique de longue date. Depuis que j'avais fait part de la demande du Seigneur Hornst au Premier Sénateur - simple forme de politesse soit dit en passant - les discussions au sein du Sénat tournaient presque exclusivement autour de ce sujet. Qui serait le successeur de Philias Hornst ? Qui serait le sixième Grand Général de l'Armée ? Avec bien sûr en arrière-plan cet enjeu politique majeur pour certains sénateurs : avoir un allié dans le camp de l'exécutif, une façon de resserrer l'emprise sur les prérogatives de la Famille Royale. Sur mes prérogatives. 

Je ne souhaitais pas commettre la même erreur que mon père avec la nomination du Seigneur Hornst, soutenu par les Sénateurs de l'époque. Non pas que Philias ne fut pas apte au poste, bien au contraire, mais les clivages politiques survenus suite à son accession à la fonction militaire suprême auraient pu mettre le royaume en péril si le traité de paix entre Ventus, Ignis et Terra avait pris fin sous son règne. Dieu merci, ce ne fut pas le cas, et j'étais quelque part soulagée de pouvoir nommer à ce poste une personne que j'estimerai digne de confiance, méritante et surtout, surtout, apolitique alors que le temps fuyait de plus en plus rapidement vers l'échéance fatidique. Un an et des poussières. Serait-ce suffisant pour permettre au nouveau Grand Général de prendre ses marques à son poste ? Il n'aurait pas vraiment le choix.

Trois jours au cours desquels j'avais eu du mal à trouver le sommeil, et encore plus à le garder sans être hantée par cet ignoble cauchemar, alors que je passais mes journées à ruminer le problème de la succession de Hornst. Je m'étais rendue à l'école militaire d'Albio, renouant avec quelques souvenirs agréables de camaraderie, de sous-officiers beuglants et de lieues entières parcourues, nos pieds suintant dans nos bottes sous un soleil de plomb ou une pluie torrentielle, le long de sentiers escarpés sur les flancs des Elénides. Une époque où je pouvais encore me permettre d'être insouciante quelques heures par jour, loin des responsabilités familiales. Mais au cours de ma visite de l'école, huit années après l'avoir quitté, j'y ai découvert de nouvelles stratégies, de nouveaux concepts en discutant avec quelques aspirants tapissés de boue sur leurs uniformes d'entraînement, la plupart présentant quelques hématomes proéminents sur le coin de la gueule. Je pouvais lire dans leurs regards pétillants de fougue toute la fierté et l'honneur qu'ils ressentaient à se dresser devant moi, et une légère pointe de honte à se présenter aussi dégueulasses, ce qui d'ailleurs leur avait valu un supplément de corvées de la part de l'officier subalterne en charge de l'unité ; et m'arracha un sourire intérieur. Putain l'armée... Ces années-là me manquaient parfois...

Puis j'eus la chance de rencontrer un de mes anciens instructeurs de l'époque, me remettant un ouvrage sur les stratégies militaires tout à fait "surprenant" selon lui, un ouvrage très moderne, intégré au cours de l'académie depuis le début de l'année. 

"La connerie, c'est toujours très moderne, Majesté. En perpétuelle évolution..." m'avait-il confié en conclusion de son laïus sur les bonnes vieilles méthodes.

Je l'avais écouté citer quelques exemples de stratégies qui lui paraissaient complètement ubuesques tandis que je les trouvais moi-même plutôt bien pensées et fort ingénieuses. C'était alors que je tombais sur le nom de son auteur. Brunhild Mayfair... J'avais vaguement entendu parler de cette dame, des histoires de lignée maudite et de trahison, je ne savais guère... J'étais bien plus jeune au moment des faits, et je devais bien avouer que les histoires intra-familiales des vassaux de mon père ne m'intéressaient guère. Jusqu'à aujourd'hui... Intriguée, j'avais demandé des renseignements sur cette Brunhild auprès de l'instructeur, lequel m'éclaira très brillamment sur le sujet. Une histoire très intéressante en réalité, pour une personnalité d'autant plus intéressante. Une véritable fille de Terra, fidèle au culte d'Albio, lutter contre le karma et toujours prendre en main sa destinée. Exactement le genre de personne qu'il fallait à Terra à l'aube d'une nouvelle crise politique.

Sauf que je n'étais toujours pas décidée, trois jours après. Les prétendants étaient nombreux pour le poste, presque autant que les soupirants espérant accéder au trône à mes côtés... Le cours de mes pensées commença à divaguer, mon menton s'enfonçant dans la paume de ma main gauche, le bras correspondant accoudé à la longue table du Conseil de Guerre, mes noisettes rivées sur le feu crépitant dans l'âtre de la cheminée, tentant de chasser le froid sec de cette fin d'hiver.

"Majesté ?" m'interpella-t-on soudainement. Je manquai de sursauter de peu, tournant soudainement toute mon attention vers l'interlocuteur m'ayant extrait de mes pensées.

"Oui... Désolée Sénateur Pellick. J'étais ailleurs," répondis-je en secouant la tête, les sourcils légèrement froncés dans un reproche que je m'adressais à moi-même. "Vous avez mon attention. Poursuivez je vous prie."

"Je vous faisais part de l'intérêt et le soutien que j'apporte, en compagnie de plusieurs de mes confrères élus du Grand Septentrion, au postulat du Général Lockland, Seigneur de Groom. C'est un homme d'expérience, un officier et un guerrier chevronné ; ainsi qu'un membre éminent de l'Ordre des Instruits. Il saura porter nos valeurs et mener nos hommes vers la victoire," reprit l'homme ventripotent, dont la voix grave et éraillée vibrait d'un ton passionné, emporté, déterminé. Beaucoup trop à mon goût. Je savais d'ores et déjà quels étaient les intérêts de Pellick et de ses pairs du grand nord de Terra : les mines d'argent du massif de Groom, très justement situées chez ce cher Général Lockland, qui ne déméritait pas pour autant les éloges du Sénateur.

*Ben voyons mon bonhomme... Cours toujours...* ruminai-je en plissant les paupières sur mes deux noisettes, feignant un intérêt que je ne lui portais absolument pas. "J'entends vos arguments, Sénateur. Le Général Lockland me semble être un élément tout à fait indiqué pour..."

"Tout à fait indiqué ?" s'offusqua soudainement un autre élu en me coupant, situé sur ma droite, trois sièges plus loin et un godet de vin posé devant lui, ses deux mains tremblantes l'encadrant. "Sauf le respect que je porte à votre jugement Majesté, Lockland n'est plus qu'un vieillard à demi-croulant, l'ombre de lui-même..." "Sénateur Chekov..." tentai-je de le couper pour reprendre la parole. "...brûlé les ailes à batifoler avec la vermine frontalière de Ventus..." "Sénateur Chekov !" le rappelai-je plus durement à l'ordre, tandis que Pellick aussi y allait de sa répartie avec la même véhémence envers son opposant. Visiblement, Chekov ne percevait aucun intérêt dans le nord du royaume et semblait défendre la candidature d'un autre élément, qui n'appartenait même pas à l'armée de Terra qui plus est. La situation dégénéra rapidement, les dix sénateurs présents s'emportèrent dans un pugilat verbal qui rendit toute discussion impossible. Mon regard trouva celui de Hornst, puis je secouai la tête avec résignation. Il était visiblement impossible aux sénateurs de se faire à l'idée qu'intérêts du royaume et intérêts personnels n'étaient pas toujours compatibles. Lentement, je poussai sur mes bras contre le plateau de la table pour reculer mon siège et me relevai, chassant quelques plis parcourant ma robe de lin.

Les discussions mirent quelques secondes à se tasser et le silence revint enfin, redevenant dès lors le centre de l'attention générale. Je pris une longue inspiration, toisant chacun des quelques sénateurs présents - les plus représentatifs et influents du Sénat - et me raclai la gorge avant de prendre la parole une dernière fois dans cette assemblée.

"Mes chers sénateurs et législateurs, je sais que vous savez où commencent vos prérogatives, vous êtes experts dans le domaine dès lors qu'il s'agisse de faire valoir vos droits, parfois au détriment des citoyens que vous êtes censés servir..."

"Calomnies ! C'est injurieux !" s'emporta Chekov en se levant à son tour, pointant un doigt accusateur dans ma direction, sous les regards réprobateurs de ses confrères. Pour ma part, je le fusillai littéralement du regard tandis que mon visage se fermait un peu plus.

"Tout autant que de me couper la parole pour la seconde fois consécutive, Sénateur Chekov. Maintenant asseyez-vous et fermez-la !" rétorquai-je d'un ton cinglant. "Vous semblez oublier que je ne suis pas mon père. J'espérais sincèrement trouver conseil auprès de vous quant à la nomination du futur Grand Général, qui est loin d'être à prendre à la légère alors que le traité de paix est en passe de prendre fin, mais je vais plutôt me fier à mon bon sens et mon instinct sur la personne choisie."

Chekov pouffa de dédain en se rasseyant, croisant les bras sur sa poitrine en s'appuyant contre le dossier de son siège, ouvertement désinvolte.

"Et qui donc vous suggèrent votre bon sens et votre instinct de jeune souveraine inexpérimentée ?"

"Le Général Mayfair," annonçai-je sans ciller, déclenchant dès lors stupeur chez certains - dont Hornst lui-même - désolation chez d'autres, et même - à ma plus grande surprise - satisfaction chez un dernier qui retint mon attention plus que tous les autres. Le sénateur Pardow, représentant les comtés les plus méridionaux et les plus austères de Terra.

"L'aînée des Mayfair ? Déshéritée par sa propre famille et meurtrière de son mari ?" s'étonna Pellick, véritablement incrédule. "Mais c'est une gamine, en comparaison de ses prédécesseurs. Pire, c'est une femme, ce qui ne facilitera en rien nos négociations futures avec le Royaume d'Ignis," m'avertit-il. Sa remarque avait certes du sens et un certain fondement géopolitique, mais très certainement pas sa place dans le paysage politique Terran.

"J'ai véritablement du mal à concevoir ces propos dans votre bouche sénateur Pellick. Je me moque bien pas mal de l'avis d'Iskandar quant à mes choix politiques, et n'ai pas de leçon de morale à recevoir de la part d'un Ignisien."

"Et cela sans compter que les Mayfair ne font pas l'unanimité auprès de la population. Les superstitions et les rumeurs les plus fantaisistes courent facilement dans les campagnes et ont la vie dure. Je doute que les soldats voient d'un très bon œil qu'une déshéritée de la lignée Mayfair les commande,"renchérit Chekov, dont le ton dédaigneux commençait à royalement me taper sur le système.

"Sénateur Pardow. Votre avis sur mon choix..."

Le vieil homme au regard émeraude sembla surpris que je le sollicite. C'était un homme au tempérament posé et réfléchi, à l'inverse de Chekov ; un politicien peu adepte de la langue de bois, qui parlait peu, avec le très grand avantage d'être écouté dès qu'il ouvrait la bouche. Un des rares sénateurs qui avait gagné mon plus profond respect au cours de mon jeune règne.

"Moi qui siège non loin de son père et de sa cadette, je suis convaincu que Brunhild est de très loin la mieux placée pour occuper ce poste et remplir cette fonction. C'est une combattante redoutable, une magicienne hors-pair et une stratège accomplie. C'est l'avis que j'ai de cette jeune femme, et je pense qu'elle et vous vous entendrez à merveille, à la différence des rapports que le Grand Général Hornst entretenait avec feu votre père, sans vouloir vous offenser Philias."

"Il n'empêche que jamais le Sénat ne validera sa nomination ! J'y veillerai personnellement auprès du Premier Sénateur !" explosa Chekov, ouvertement menaçant.

"Et je vous rappelle, sénateur Chekov, qu'au regard de la Constitution Terrane, la direction de l'armée est entièrement assumée par le pouvoir exécutif, à savoir moi et qu'en conséquence, peu importent vos simagrées, je reste la seule décisionnaire quant à la nomination du Grand Général et que votre implication dans ce choix ne relève que de la simple politesse et bienséance de ma part ; des notions qui vous semblent totalement étrangères au demeurant," lançai-je sèchement à ce vindicatif législateur sans me démonter, avant de reporter mon attention vers Hornst. "Grand Général, je vous laisse le soin d'annoncer la proposition au Général Mayfair."

"Et si elle refuse, vers qui dois-je me tourner ?" me demanda-t-il, un bref espoir transparaissant dans sa voix. Lui aussi semblait ne pas approuver mon choix. Un espoir naissant que je me décidais à tuer dans l’œuf.

"Elle ne refusera pas, et vous le saviez avant même de poser la question. L'affaire est réglée."

"Oh non elle ne l'est pas !" protesta Chekov une nouvelle fois, ce qui suscita un haussement de ton de la part du Grand Général lui-même à l'égard du sénateur.

"Ça suffit Chekov ! On vous a assez entendu comme ça. La Reine a fait son choix, et il est de votre devoir de l'honorer désormais, peu importe vos griefs personnels," conclut-il avant de retrouver son calme. "Ce sera fait votre Altesse."


Si la nomination de Brunhild à la tête de l'armée avait fait bondir la grande majorité du Sénat et des différents Seigneurs des provinces vassales, elle avait surtout eu pour conséquence d'enfin asseoir mon autorité auprès de mes derniers détracteurs ; et l'année qui suivit confirma à tous, même aux plus revanchards et récalcitrants des généraux en poste que ma décision fut la bonne. Le Grand Général Mayfair par ses actes, son caractère et sa vision des choses était en train de mener notre Armée vers un âge d'excellence et de modernisme que mon père n'aurait jamais pu atteindre de son vivant, trop agaillardi dans ses principes datant d'une autre époque, guidé par ce vieil adage en Langue Ancienne : ''Si Vis Pacem Para Bellum''. Désormais assise après sept années de règne marquées par la contestation et le conservatisme, mon implacable volonté de réformisme s'installait dans le paysage politique Terran, et y trouvait sa place. Les ''vôtre Père aurait...'' ou ''vôtre Mère ferait...'' avaient fini par se taire.

Père, Mère, reposez en paix. Je suis Reine de Terra désormais.








Ill Omen18 Février 762 - Début de matinée
Palais Royal - Hystia


Je savourai la chaude caresse d'un rayon de lumière matinal filtrant au travers des vitraux de la chapelle, faisant miroiter des grains de poussière virevoltant de nuances orangées, azurées ou pourpres. Malgré l'heure encore matinale, l'agitation quotidienne avait déjà gagné les nombreux couloirs du palais royal. Il allait me falloir écourter mon recueillement au pied de l'effigie d'Albio, son bras gauche tendant une main amicale vers un nécessiteux imaginaire, sa main droite reposant sur le pommeau de son épée. Sa stature était altière, robuste, dégageant une puissance qui se serait révélée écrasante si les traits de son visage n'avaient pas été aussi rassurants.

Pourquoi étais-je agenouillée aux pieds d'Albio, emplie de doute et de frustrations envers Ehol ? Tout simplement parce que je l'avais de nouveau senti près de moi hier soir, cette nuit... Karel avait combattu cette nuit, il avait été touché. Je le savais distant, il n'était pas à Hystia, mais j'avais réussi à percevoir la douleur, l'horreur, la mort et la violence qui l'imprégnait. Je me posais de plus en plus de questions à propos de l'état de santé mentale de mon frère. Combien de temps parviendrait-il à tenir à ce rythme-là ? Combien de temps parviendrais-je moi-même à le suivre sur cette voie-là ?

Trois coups résonnèrent contre l'huis de la porte de la chapelle, m'arrachant à mon recueillement et mes pensées. Mes noisettes se dirigèrent vers l'origine du trouble. Je me relevai, m'inclinant une dernière fois face à la statue de l'émissaire afin de faire face au vivant de l'autre côté de la porte, lissant les plis de ma robe en soie aux reflets d'ocre et de cannelle, rehaussant mon châle sur mes épaules.

"Entrez !" ordonnai-je d'une voix ferme, dont l'autorité se répercuta en échos contre les colonnades, mourant sous les voûtes. Mon visage avait retrouvé cette impassibilité austère qui sied à ma fonction. Même dans l'intimité de ma piété, je me devais d'extérioriser aux yeux de tous mon assurance de monarque Terrane. Impassible et inébranlable. Figée - à l'image de la statue me dominant - parée à affronter toutes les tempêtes sans faillir. Je reconnus l'uniforme aux armes de la garnison du Palais, retirant son heaume avant de poser le genou à terre, inclinant la tête. Le soldat devait avoir mon âge, soit un nouvel élément en ces murs, car ne servait pas à l'intérieur du Palais Royal le premier venu.

"Pardonnez-mon intrusion ma Reine," commença-t-il d'un ton révérencieux mais ferme, dénotant chez lui une assurance certaine qui justifiait très certainement sa place dans les rangs de la garnison. "Un messager vient de nous rapporter qu'Hustar a été attaqué cette nuit."

Je sentis mon cœur se serrer dans mon poitrine, un frisson glacé courant le long de ma colonne vertébrale, en encaissant la nouvelle. C'était donc là-bas que se trouvait Karel.

"Des victimes ?" demandai-je au jeune homme, maîtrisant mon ton pour ne pas trahir trop ouvertement mon inquiétude. Cependant, je ne pus empêcher la colère qui montait en moi de durcir encore mon phrasé en sachant pertinemment que oui, il y avait eu des victimes.

"Nous n'avons encore aucun rapport détaillé de la situation. Juste ce constat ma Reine," me répondit-il en se relevant. "Que devons-nous faire ?"

Je m'avançai vers lui d'un pas décidé, une allure soutenue. Il me dépassait d'une bonne tête, et sa carrure me faisait paraître bien frêle à ses côtés. Fermement, ma main droite se posa sur son épaule, mes doigts s'enfonçant légèrement dans les mailles de son haubert.

"Rien pour l'instant, soldat. Réagir à chaud et à l'aveugle est la pire des options. Merci pour votre célérité."

"Entendu ma Reine. Je suis à votre disposition si besoin." Il me salua de nouveau puis s'éloigna du même pas pressé ; mes noisettes ne se détachant de sa silhouette qu'après de longues secondes où je restai interdite. Puis un murmure las s'échappa d'entre mes lèvres. "Je sais..."



Ehol
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Dim 8 Juin - 19:20
Je ne pensais pas voir ce jour arriver, mais si! Oui! Oui! Nous avons enfin une reine de Terra!
Les miracles arrivent, finalement!

Excellente fiche, du début jusqu'à la fin, j'ai eu très peu de choses à en redire. Karel va sûrement devoir légèrement modifier la sienne, mais cette version me semble plus cohérente avec les pactes.

Au plaisir de se croiser en RP!

Puissance - Rang A+:

Génie de la magie et descendante, bien qu'indirecte, de la lignée d'Ignis, Ellana possède une très grande réserve de mana et une maîtrise de la terre lui permettant de figurer parmi les plus puissants magiciens de cet élément de part le monde. Ayant fait ses armes dans une école militaire Terranne, elle peut aussi tenir tête en combat singulier face à des personnes beaucoup plus fortes qu'elle-même, voire des pactisants.

Influence - Rang A:

Reine de Terra, symbole du pays et chef suprême de l'armée, Ellana forme à elle seule l'un des trois pouvoirs de Terra, et par là même, est la personne possédant le plus d'influence sur le pays. Elle est toutefois loin d'avoir tous les pouvoirs et doit cohabiter avec les différents pouvoirs du pays: le sénat, les hommes de foi et l'armée.

Bon, maintenant je peux le dire.
Bienvenue sur le forum, chère reine de Terra!

Ellana Senyl
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Dim 8 Juin - 19:24
Dix-huit mois après m'être inscrit, je peux enfin le dire : YEEEAAAHHH !!!  cheers 

Merci pour la validation mon cher Ehol, et au plaisir de se croiser en RP.

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